Innovation Pédagogique et transition
Institut Mines-Telecom

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Apprendre à apprendre en Anthropocène - « Multitude »

Un article repris de https://living-lab.cnam.fr/apprendr...

« Multitude » est un « parcours expérientiel apprenant » en deux volets. Il se compose d’une recherche-création et d’un parcours immersif qui font partie du Projet d’Investissement d’Avenir (PIA  3) “Innover dans l’accompagnement et la sécurisation des parcours” porté par le Conservatoire National des Arts et Métiers des Pays de la Loire. La recherche-création et le parcours immersif sont portés par le pôle Sciences-Société et Transition (SST).  
Au travers de ce projet, le Cnam souhaite apporter sa contribution aux enjeux d’émancipation liés aux capacités d’apprentissage de chacun, en termes de compétence pour ses intervenant·es et ses collaborateur·ice·s et pour la diffusion de ces innovations vers un public large dont les actifs. Le parcours abordera les questions suivantes :  

  • Le réchauffement climatique, effondrement de la biodiversité et dépassement des limites planétaires avec toutes les transformations sociétales qui en découlent,
  • L’orientation professionnelle dans un contexte de mutations profondes ∙ Apprendre à apprendre : compétence clef pour relever les défis des transitions à venir. 

Tel que le suggèrent, entre autres, le rapport Jouzel-Abadi et les phénomènes de désertion des grandes écoles, il apparaît désormais nécessaire de former les apprenants en adéquation avec les constats et les défis posés par l’Anthropocène. Il s’agit de construire et d’expérimenter des outils qui accompagneront les actifs, les formateurs, les étudiants et les apprenants dans le milieu professionnel, au regard de la transition écologique et qu’ils initient leurs propres transformations. C’est pourquoi nous élargissons notre point de vue sur le devenir des formations à un registre plus large qu’est celui de l’éducation comme projet de société en versant notre démarche dans le creuset des cultures contemporaines.  
Notre expérimentation s’attèle donc à explorer la place singulière qu’occupe l’éducation dans l’établissement d’une culture commune au sein d’une société à l’aune des enjeux et des causes de l’Anthropocène en la questionnant par le prisme artistique. Cela nous renvoie à la question de la place des émotions au sein de l’apprentissage.  

Les deux volets du projet 
« Multitude » est une opportunité en deux temps, une recherche-création et un parcours immersif, pour signifier l’importance de l’apprendre, au sein et en dehors de l’école, avec un appui pluridisciplinaire, allant des sciences de l’éducation, au journalisme en passant par les arts et la médiation scientifique.   
Empruntant de multiples voies, y compris des voies peu explorées et informelles, le premier volet est une recherche-création qui se compose :  

– d’un dispositif d’enquête (sous la forme d’ateliers) expérimenté sur quatre terrains (militants, doctorants, lycéens, salariés d’entreprise). Les résultats des ateliers sont compilés dans la plateforme numérique sous forme d’enregistrements audios.  

– d’une plateforme numérique comme support à l’histoire à travers l’apprentissage humain /numérique pour visibiliser ses propres apprentissages  

– d’un parcours immersif et interactif sur le thème des hydromondes, la thématique de l’eau nous permettant de traiter tous les aspects de l’Anthropocène, il vient compléter le premier volet en reprenant le même séquençage). Il sera composé :  

– d’ateliers (plateau radio et œuvre collective), 

– d’une scénographie immersive, 

– d’interfaces humains/machine reliées à la plateforme numérique qui diffuseront les enregistrements audio, 

– et prendra vie par le biais d’une performance théâtrale immersive minimaliste. 

Le parcours peut se concevoir comme une cartographie d’expériences mise en scènes autour des concepts de l’apprendre à apprendre et postures de médiation mobilisées au sein de la recherche création. Ce parcours sera un écho à ce qui s’est passé au cours des terrains d’enquête mais sera aussi une opportunité de la continuer.  
L’ensemble Multitude forme un parcours expérientiel apprenant à différents niveaux de lecture, à la fois pour l’équipe projet, les participants de l’enquête et enfin le public du parcours immersif. Il établit des espaces d’autoréflexion et d’observation de l’apprendre comme moyen de trouver de la ressource, dans le savoir-être, le faire, les connaissances afin de se redonner de la capacité d’agir pour transformer le monde. C’est ici notre hypothèse principale de départ. 

Nos hypothèses 

  1. Vouloir apprendre  : quel rôle revêtent le sensible et les émotions dans la motivation des apprenant.es ?

Pour apprendre, il faut le vouloir, c’est-à-dire être motivés. Nous faisons l’hypothèse que l’apprentissage ne se réalise pas en l’absence d’émotions, et que certaines émotions peuvent renforcer la motivation intrinsèque des apprenants. (Exemple : l’éco anxiété peut parfois devenir une source de motivation pour l’action). 
Notre défi, c’est que Multitude crée un environnement où les émotions des apprenant.es soient stimulées pour mieux apprendre, dans un contexte d’apprentissages hors des murs scolaires. Le dispositif artistique multisensoriel (installation sonore et lumineuse, matériaux choisis avec soin par les scénographes, interaction avec les médiateurs et le public, voix humaines portant des souvenirs avec émotion, etc.) peut créer des sensations et des émotions fortes. En offrant le contexte favorable à des situations d’apprentissage riche de sens et de sensations, le dispositif œuvre au renforcement d’une motivation intrinsèque à l’apprenant.  

Question : est-ce qu’il y a aura des émotions vécues, et si oui lesquelles seront la source d’apprentissages ? Quels sont les dispositifs les plus réussis du parcours ?  

Ce que nous pouvons observer : est-ce que nous observons des émotions manifestées par le public présent ? Est-ce que des interactions avec des dispositifs (visuel, théâtre, écriture, écoute, etc.) sont préférées ? Est-ce que les médiateur.ices ont des conversations récurrentes sur des éléments plus saillants que d’autres ? Quels débats émergent spontanément ?  

Ce sur quoi l’équipe peut avoir un contrôle lors de la création du parcours : quels éléments de savoirs sont transmis ? Est-ce que ces éléments apparaissent dans les retours du public ? D’autres éléments sont à noter : le ton adopté, l’adresse au public, les émotions parcourues par les navigateur.ices, etc. 

Question à poser au public : qu’est-ce que vous avez préféré apprendre ?   

  1. Pouvoir apprendre : comment déployer la notion de confort d’apprentissage au sein d’une exposition et durant les ateliers ?

Pour pouvoir apprendre, il semble que le confort de l’expérience soit un prérequis pour que les publics en tire le meilleur parti. S’ils ont accès à des conditions de confort minimum : un bon accueil dans l’espace, un temps organisé, une acoustique et une température agréable, un contexte culturel commun, une attention dédiée au groupe et ses besoins. Nous avons pu, d’ores et déjà, observer la variation de la qualité d’écoute et de prise de parole et débat suivant les différentes configurations de l’espace et de nos postures d’animation durant les ateliers multitude.  
Pour que la majorité du public soit en mesure de profiter du parcours estival, malgré les risques de canicule, nous organisons des espaces accueillants, avec un grand soin porté à l’esthétique de la scénographie, ainsi qu’un lieu de détente, des espaces réfléchis pour garantir le meilleur confort acoustique possible.  

Question : pourrons nous réunir les conditions nécessaires pour donner toutes ses chances à l’apprentissage (temps, agencement des lieux, expérience qui est proposée, dispositif mis en œuvre) ? 

Ce que nous pouvons observer : la durée de passage dans le parcours …en fonction des indicateurs météo. Et nous pouvons observer l’aisance dans l’espace, des lieux moins utilisés que d’autres, tendre l’oreille pour entre les langues parlées par le public (touristes du mois d’août). 

Ce sur quoi l’équipe peut avoir un contrôle lors de la création du parcours : le soin porté aux installations fixes (accessibilité, simplicité d’utilisation, confort) et au parcours du public, ainsi que la prise en compte des épisodes caniculaires, le niveau de langage de la communication et à l’accueil du public.  

Question à poser au public : comment vous sentez-vous dans cet espace ? Qu’est-ce qu’il vous a manqué pour se sentir mieux ?  

  1. Pouvoir apprendre : Le confort oui, mais comment interpeller le public pour aborder des sujets anxiogènes et les inciter à relever des défis d’apprentissage ?

Des sujets anxiogènes (tels que le changement climatique, les souvenirs douloureux de sa scolarité dans certaines matières, etc.) peuvent être un frein à l’apprentissage et même créer des blocages durables. Il nous faut élaborer d’autres adresses face à la peur et l’évitement.  
En mobilisant la dimension collective, sociale de l’apprentissage, nous espérons répondre partiellement à l’enjeux d’éco anxiété. Et c’est parfois les autres qui nous montrent l’étendue de ce que l’on peut encore apprendre ! 
L’hypothèse est de s’adresser au public au moyen d’un dispositif fictif et vivant pour aborder les questions d’apprentissage et les enjeux de l’eau, car c’est peut-être le moyen de pallier l’effet repoussant de ces sujets anxiogènes. On utilise la théorie de la zone proximale d’apprentissage pour proposer une solution : surmonter ses blocages d’apprenants en miroir des personnages qui font de même. En s’adressant au public par l’angle du récit incarné, nous leur proposons d’entrer en contact avec des personnages capables de les inspirer. Nous souhaitons par ce bien éviter de nous adresser au public en tant que donneurs de leçons. 

Question : est-ce que ce dispositif vivant redonne du pouvoir d’apprendre au public, concernant les sujets anxiogènes des blocages d’apprentissage et des enjeux de l’eau dans un contexte de dégradation environnementale liées à l’action humaine ?  

Ce que nous pouvons observer : l’interaction avec les commédien.nes et les médiateur.ices, la participation à la programmation, les résultats d’enquête des ateliers, etc. 

Ce sur quoi l’équipe peut avoir un contrôle lors de la création du parcours : le ton adopté est choisi collectivement, et rend compte de l’attention portée aux émotions lorsqu’on est confronté à un sujet anxiogène.  

Question à poser au public : est-ce que vous avez eu envie d’apprendre quelque chose grâce aux navigateur.ices ? Qu’est-ce qui vous a fait venir ?  

  1. Savoir apprendre  : donner à voir une diversité de représentations des freins à l’apprentissage permet-il de se connaître en tant qu’apprenant ?

Face à l’adversité, il est difficile de prendre du recul, de savoir quoi faire. Surtout lorsqu’il s’agit de ses propres difficultés, ses croyances et ses angles morts.  
Nous faisons l’hypothèse que la diversité des réflexions sur les stratégies d’apprentissage est plus féconde que l’assignation à une catégorie d’apprenant (telle que pratiquée dans les tests tels que l’indicateur de Type de Personnalité de Holland (RIASEC), l’indicateur de Styles d’Apprentissage de Kolb (LSI), le questionnaire des Styles d’Apprentissage de Honey et Mumford…). En laissant l’expression à de multiples voix, il y a plus de liberté dans l’identification à une, ou plusieurs stratégies d’apprentissage, toutes valides et complémentaires. Si une posture réflexive devient la source de nouveaux apprentissages, alors la liberté de s’identifier à une multiplicité de représentations est encore plus enrichissante. 
Pour permettre la réflexivité sur ses apprentissages lors d’une visite estivale, assez courte et divertissante, Multitude met en scène des personnages fictifs pour susciter de l’intérêt, avant même de susciter de la réflexion. Ces personnages sont choisis pour représenter une diversité de stratégies d’adaptation face à des blocages dans l’apprentissage. Ce dispositif autorise les apprenant.es à s’identifier à plusieurs représentations, un peu archétypales, et permet de librement relier les contenus pédagogiques à leurs propres expériences.  

Question : est-ce que les archétypes mis en scène permettent d’éclairer le vécu des publics et donner conscience des blocages dans l’apprentissage, ainsi que l’espoir de les surmonter ? Est-ce que les explications scientifiques permettent, en complémentarité, d’identifier des ressources supplémentaires pour surmonter des blocages vécus dans le parcours des apprenant.es ?  

Ce que nous pouvons observer : l’effet miroir ressenti face aux comédien.nes, invitant ou non à échanger, à participer. De plus, nous avons les témoignages des ateliers.  

Ce sur quoi l’équipe peut avoir un contrôle lors de la création du parcours : la diversité des représentations en choisissant des cas différents de blocage d’apprentissage et de personnalités.  

Questions à poser au public : si vous étiez un personnage, ce serait lequel ? Pourquoi ? Est-ce que vous avez eu du mal à vous identifier ?  

Des observations et interviews seront donc réalisées tout au long du projet et pendant l’exposition pour apporter des éléments de réponses à ces hypothèses. 

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