Un article repris du site de la Revue française des sciences de l’information et de la communication une publication sous liecence CC by nc sa
Dorian Reunkrilerk et Estelle Berger, « Médiation au design avec des ingénieurs : le tact comme posture », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 23 | 2021, mis en ligne le 01 septembre 2021, consulté le 14 octobre 2021. URL : http://journals.openedition.org/rfsic/12138 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rfsic.12138
Introduction : Injonction à l’innovation ?
La notion d’innovation est incontournable pour les organisations, aujourd’hui soumises à une injonction paradoxale qui les pousse à changer constamment pour maintenir l’homéostasie du système (Basso Fossali, 2011 ; Christian, 2019). Il s’agit surtout de « faire (des) innovation(s) », c’est-à-dire de s’attacher aux résultats tangibles des pratiques. Ces dernières sont souhaitées réplicables et transférables, au détriment souvent de la prise en compte du contexte qui les sous-tend - en particulier de l’existence d’une culture de conception suffisamment intégrative pour les déployer. Cette focalisation risque ainsi de voiler un enjeu important : la rencontre entre des cultures de conception parfois dissonantes ou divergentes.
Dans ce contexte d’injonction à l’innovation généralisée, le design thinking est souvent adopté comme une boîte à outils appropriable par les non-designers pour développer les capacités d’innovation d’une organisation (Kleinsmann et al., 2017). Plus spécifiquement, cette mobilisation vise les effets suivants :
- Réduction des biais cognitifs qui consistent à projeter sa propre vision du monde, à limiter le champ des processus de recherche, ou à ignorer les données contrariantes (Liedtka, 2015).
-* Aide au cadrage de problématiques mal définies et formulation de questions autour desquelles mobiliser les acteurs de la conception (Mahmoud-Jouini et al., 2016).
-* Intégration d’outils et méthodes permettant la coopération multidisciplinaire de spécialités et fonctions auparavant séparées (Brown, 2009 ; Cross, 2011).
Or, le recours au design thinking décontextualisé de ses fondements culturels fait l’impasse sur les attitudes cognitives et états d’esprit traditionnellement associés à la démarche de design (Archer, 1979 ; Hassi et Laakso, 2011), laquelle associe en particulier l’analytique et le rationnel d’une part, l’intuitif et le sensible d’autre part (Lawson et Dorst, 2009 ; Beck et Stolterman, 2015).
Cette étude s’attache aux enjeux relatifs à la rencontre entre deux cultures de conception dans le cadre d’une injonction à l’innovation. Elle s’attache au cas du département Innovation d’une multinationale de la métallurgie, intégrant le design dans un contexte dominé par l’ingénierie et par une pratique de conception dite réglée (Hatchuel, Weil et Le Masson, 2014). Il est ainsi attendu une ouverture de cette culture de conception réglée à des approches plus exploratoires et génératives. Les auteurs, designers chercheurs engagés en tant que doctorant CIFRE et co-encadrante, y déploient une recherche-action qui repose en particulier sur les objets intermédiaires utilisés dans les projets de conception. Si ceux-ci sont porteurs d’une culture matérielle déjà ancrée, ils contiennent aussi un potentiel de générativité, qui résonne particulièrement avec l’approche abductive de recherche en design (Berger, 2017 ; Kolko, 2010).
Cet article analyse une intervention de médiation au design, afin d’en comprendre les effets sur la culture de conception mobilisée au sein de l’organisation. Nous proposons la notion de tact pour qualifier la rencontre entre ingénierie et design, la coexistence de différentes potentialités et l’ouverture d’une dynamique de transformation.
Plutôt qu’étudier les changements en termes de structures, de process ou de ressources humaines, il s’agit d’abord de reconnaître comment les différentes façons de concevoir impliquent des valeurs, des assomptions, devenues invisibles au quotidien (Bowker et Star, 1999). L’implémentation de nouvelles pratiques peut ainsi créer des conflits entre les acteurs d’une organisation et chez ces acteurs eux-mêmes. En ce sens, le mouvement vers une nouvelle culture de conception repose sur la capacité à gérer les contradictions, et à adapter l’échelle et la profondeur des changements induits dans l’organisation (Volberda et al., 2014). Le défi associé au déploiement du design réside donc dans le développement d’une approche intégrative, qui permette à deux cultures de conception de se rencontrer et de se nourrir, dans le respect du contexte spécifique de l’organisation.
Notre analyse d’une expérimentation avec les ingénieurs de l’équipe R&D vise ainsi à éclairer comment une telle situation de médiation peut amorcer une redéfinition des rôles des individus impliqués, induisant de potentiels changements culturels dans l’organisation.
État de l’art
Des cultures de conception
Avant toute chose, il semble nécessaire de préciser le cadrage conceptuel de cette recherche et notamment de caractériser les conditions d’exercice des pratiques de conception tant en termes de processus organisationnels que d’agencement socio-matériels. La notion de culture de conception, au cœur de ce dossier, permet ainsi de rendre compte des mobilisations matérielles, des dynamiques sociales, des représentations circulantes et partagées et des identités qui se construisent dans une organisation.
Concernant le design entendu comme l’une de ces « cultures de conception », il est à noter que terme design culture apparaît dans les années 2000, pour qualifier les relations entre les productions et les acteurs engagés dans leur création, fonctionnement et reproduction (Julier et al., 2019). Ezio Manzini (2016) en distingue trois catégories :
– Le diffuse design désigne selon lui l’habileté naturelle de chacun à adopter une approche combinant un sens critique, créatif et pratique.
– Le co-design caractériserait le processus de conception résultant de l’interaction de diverses disciplines et parties prenantes.
– L’expert design se réfère enfin aux designers professionnels produisant des visions concrétisées dans des propositions réalisables.
Chacune de ces catégories englobe les connaissances, les valeurs, les visions et les critères de qualité qui émergent des conversations menées durant les activités de conception et dans des lieux spécifiques. Un lien très clair est ainsi établi entre le développement d’une culture de conception et le développement d’une profession.
La littérature montre effectivement que, dans un écosystème organisationnel, le rôle du design est souvent sujet à négociation et donc construit en relation avec les autres acteurs. L’identité professionnelle des designers ne se limite ainsi pas aux différentes facettes de leur « soi », mais est co-créée par les interactions négociées avec leur environnement (Björklund et al., 2020). Plutôt qu’une culture générique, il existe de multiples cultures design, situées dans leur contexte organisationnel. Pour Deserti et Rizzo (2014), plus l’ancrage des designers au sein d’une organisation est négocié, moins une culture design spécifique pourra y émerger.
Cette recherche s’intéresse à la rencontre entre les cultures de conception des designers et des ingénieurs, rencontre amorcée dès la fin du XIXe siècle avec la rationalisation de la production industrielle. La conception s’organise alors techniquement et socialement autour de règles normalisées et méthodiques, pour permettre l’amélioration et la diversification des produits. Dans cette acception industrielle, le design se structure donc de façon « réglée ». Les capacités génératives du concepteur sont bridées au profit de la recherche d’une efficacité. Aujourd’hui, cette démarche est présente dans certaines industries où la conception signifie avant tout résolution de problèmes (Le Masson et Weil, 2010). En contraste, la conception dite « innovante » cherche à revisiter l’identité de l’objet en conception. Ce dernier se stabilise au fur et à mesure que des propriétés y sont ajoutées, modifiées, rejetées. Ce second modèle donne davantage de poids à la générativité en conception, qui doit « contribuer à des expansions conceptuelles fortes et à des restructurations des connaissances profondes » (Le Masson et Weil, 2016, p. 87). L’activité de conception ne consiste ici plus seulement à produire des solutions sous forme d’objets mais à explorer l’identité de ces objets en se concentrant sur la co-construction d’un problème et de ses solutions associées. Ceux-ci se matérialisent et évoluent de concours, dans les différents médias utilisés (Dorst et Cross, 2001).
L’objet intermédiaire : la culture de conception en (inter)action
A propos des arrangements socio-matériels qui matérialisent les cultures de conception, la notion d’objet intermédiaire a émergé des recherches en sociologie des sciences et techniques dans les années 1980. Elle désigne l’ensemble des médias (textuels, graphiques ou physiques) concourant à la réalisation de la version dite finale d’un objet.
Pour le concepteur, ces représentations facilitent un dialogue avec ses propres représentations intellectuelles, comme au sein de projets rassemblant des acteurs divers (Bassereau et al., 2015). Les objets intermédiaires témoignent alors de la construction d’un accord commun, avec un effet structurant sur les relations que les acteurs développent pour obtenir un résultat, et un effet d’alignement quant aux références communes partagées pour mener à bien ce travail (Vinck, 2012) :
– Supports de représentation. Le sens véhiculé par ces objets est tiré de ce que les acteurs y inscrivent ou façonnent. Ils s’inscrivent ainsi dans une double temporalité : en amont le cadre de pensée, l’identité d’un champ de pratique et les relations de pouvoir ; en aval les projections attachées au produit en cours de réalisation.
– Supports de traduction. un objet intermédiaire ne peut être réduit à une intention. Sa relative opacité oblige chaque acteur qui s’en saisit à l’interpréter à sa manière. À chaque fois, quelque chose émerge et le format existant est renouvelé. Ainsi, l’exercice de traduction, « jeu du même et de l’autre », permet d’apporter de nouveaux points de vue, de nouvelles connexions et idées (Jeantet, 1998, p. 303).
– Supports de médiation. Puisque toute interaction avec des objets intermédiaires modifie le cours du processus de conception, ceux-ci outillent la confrontation des points de vue « en offrant des prises, en facilitant le surgissement de solutions et de rapprochements entre des aspects autrement dissociés. Au cours de chacun de ces passages, [...] le mouvement échappe partiellement à ses auteurs » (Vinck, 2009, p. 58).
Les objets intermédiaires témoignent également de mécanismes de légitimation des pratiques au sein du processus de conception : ils doivent en effet fédérer un maximum d’acteurs pour qu’une orientation commune et partagée émerge. Cette caractéristique les lie à un enjeu stratégique ayant trait à l’autorité qu’ils peuvent véhiculer. Au gré de leur circulation dans l’espace et entre acteurs hétérogènes, l’équipement de ces objets peut ainsi se charger de catégories ou conventions qui ne sont pas nécessairement consensuelles (Vinck, 2011). Il est alors intéressant de remarquer que la culture de conception des ingénieurs témoigne d’une attention à ne pas renforcer cet effet d’autorité, notamment par la recherche d’une définition la plus explicite et la moins ambiguë possible de l’objet à créer et produire. Au contraire, celle des designers intègre et assume l’expression de subjectivités (Lawson et Dorst, 2009 ; Beck et Stolterman, 2015 ; Berger, 2018).
Pour clore ce panorama sur la notion d’objet intermédiaire, il est à noter qu’elle entretient des liens avec celle précédemment théorisée d’objet frontière. Des objets intermédiaires deviennent ainsi frontières lorsqu’ils portent des éléments structurels partiellement communs à plusieurs mondes sociaux, dans une structure minimale reconnaissable (Vinck, 2009). Celle-ci permet de les relier à des systèmes de classification (Bowker et Star, 1999) : des espaces de circulation normés et standardisés facilitant la communication entre acteurs hétérogènes. En retour, les objets intermédiaires cristallisent les standards, conventions et choix des acteurs, les forçant à partager un cadre de travail commun (Boujut et Blanco, 2003 ; Vinck, 2009). C’est ainsi qu’ils peuvent être au cœur de processus de coordination entre plusieurs mondes sociaux différents, à l’instar des objets frontière (Mer et al., 1995 ; Peters et al., 2010).
Une expérience de médiation au design
Contexte, enjeux et méthode de l’intervention
Étudier les implications de l’introduction de pratiques nouvelles au sein d’une culture de conception déjà sédimentée requiert de prendre en compte la dimension systémique du changement. Dans un contexte de dynamique de groupe, différentes forces sont à l’œuvre : les valeurs, normes et comportements individuels, ainsi qu’une résultante de cohésion qui transcende le niveau interindividuel (Lewin, 1947 ; Faulx, 2019). Suivant l’approche développée par le psychologue social Kurt Lewin, c’est par la recherche-action que l’on peut réellement observer et comprendre un tel processus. Celle-ci se mène en milieu naturel, en collaboration avec les individus, et associe des processus de recherche à des processus d’intervention (Marrow, 1972 ; Faulx, 2019). Pour parler du terrain, il faut l’expérimenter et ainsi participer à la transformation de l’objet étudié. La démarche est abductive, dans un processus itératif entre théorie et expérience sensible du terrain (Glaser et Strauss, 1967 ; Thomas, 2010). Le processus de recherche vise alors moins à expliquer ou prédire qu’à former des hypothèses créatrices aptes à ouvrir des opportunités.
Cette approche est privilégiée par les chercheurs en design, car elle résonne avec une discipline qui vise à transformer des situations existantes en situations préférables (Simon, 1996). Selon le modèle proposé par Alain Findeli (2005), une recherche par le design fait appel aussi bien aux méthodes créatives familières au designer qu’aux méthodes de la recherche dite « fondamentale », employées par exemple dans les sciences sociales, pour produire des connaissances à la fois conceptuelles et applicables.
Cette étude s’appuie sur l’immersion d’un designer chercheur au sein du département Innovation d’une multinationale de l’industrie de la métallurgie, pour répondre à une volonté d’ouverture des pratiques d’innovation dans un milieu profondément marqué par une culture de conception réglée. Durant trois ans, la recherche-action se déploie ainsi de l’observation participante à la proposition d’initiatives puis de modèles conceptuels, construits à partir du cas spécifique de l’entreprise mais devant avoir pertinence au-delà. Cette étude relate et analyse une expérimentation visant à développer les pratiques de conception des ingénieurs. Plutôt que des résultats, nous proposons de discuter du processus d’intervention et de la transformation amorcée, que nous envisageons sous l’angle du tact. Nous espérons ainsi contribuer à outiller la posture réflexive des chercheurs engagés dans des situations similaires.
Une intervention pour réinvestir le processus de conception
Au lancement du processus de recherche, une enquête au sein de la R&D européenne avait révélé que ce service (comptant une centaine d’ingénieurs) manifestait un « manque en termes de pratiques de conception innovante ». La majorité des répondants considéraient que leurs tâches de conception étaient trop dirigées vers des enjeux de développement plutôt que de recherche et d’innovation. Leur travail leur apparaissait ainsi soumis à des contraintes de faisabilité technique et économique, avec l’efficacité comme finalité principale. Dans ce cadre, l’intervention du designer chercheur devait contribuer à « créer un nouveau dynamisme de conception en dehors de tout projet, en dehors de contraintes de délai ». La première phase de la recherche-action s’est attachée à cartographier les médias existants dans la conception, dont certains objets intermédiaires. Différentes médiations ont ensuite été proposées, dans l’objectif d’ouvrir la pratique des médias à une culture de conception davantage exploratoire et générative, telle qu’observée chez les designers.
Contrairement à la majorité des interventions ayant recours au design thinking, il n’a pas été choisi ici d’amener de nouveaux outils mais d’explorer le potentiel des objets intermédiaires déjà utilisés dans l’entreprise, en développant leur appropriation par les ingénieurs mécaniques. Plus largement, le design n’est pas invoqué comme nouvelle culture de conception à adopter, mais comme opportunité d’établir une distance critique et pratique avec la culture de conception sédimentée dans la R&D, et d’y apporter une dimension davantage exploratoire.
L’objet intermédiaire considéré ici est le Processus de Développement de Produit (PDP), un document commun à l’ensemble des départements R&D de l’entreprise, détaillant les activités à réaliser par tous les corps de métiers. Il représente ainsi la colonne vertébrale des pratiques de conception, autour de laquelle vont se fédérer les ingénieurs. Le PDP fonctionne ainsi comme objet intermédiaire :
– Structurant les relations de travail au sein d’une activité de conception réglée où l’élimination des problèmes et la recherche de solutions sont la priorité.
– Alignant ces relations sur un référentiel commun constitué de règles normalisées et d’une terminologie commune pour mener à bien l’activité.
Affiché en grand format dans toutes les salles des espaces de conception, le document agit comme un rappel méthodique faisant circuler l’autorité de l’entreprise à imposer des pratiques et légitimer une culture de conception réglée. Or, l’analyse d’usage des 27 étapes du PDP a permis de révéler que celle-ci ne faisait pas l’unanimité et était associée à un manque d’esprit d’innovation au quotidien. Ainsi, les premières étapes, où est supposée s’exprimer la plus grande liberté, sont négligées voire sautées afin d’arriver plus vite à la création des plans de conception. Un ingénieur qualifie même l’une de ces phases de « mythe ». De plus, une enquête menée en ligne a permis de préciser que les sources de connaissances mobilisées par les ingénieurs dans leurs activités étaient majoritairement internes, donnant lieu à des concepts atteignables avec les connaissances disponibles. Inversement, l’exploration de sources de connaissances extérieures, pour imaginer des concepts surprenants, reste minoritaire.
Autour du PDP se construit donc une ambivalence :
– Consensus : le sens véhiculé par ce document fournit à la R&D un champ de pratique et un cadre de pensée stables, liés à une culture de conception réglée.
– Dissensus : les projections associées à cet objet dans les différentes opérations de traduction font émerger des volontés parfois contraires à cette culture.
À la fois moteur d’une culture de conception et acteur de sa remise en question, cet objet intermédiaire a donc fourni les enjeux de l’expérimentation : amener les concepteurs à réinvestir les premières phases du PDP, qui mettent en jeu les différents termes autour duquel un thème va devenir un produit ou service industrialisable.
La thématisation, opération peu visible dans les pratiques des ingénieurs de l’entreprise, est néanmoins très importante dans un acte de conception. Un thème ne doit être ni trop flou ni trop restreint, pour stimuler l’exploration au-delà des zones de confort. L’expérimentation devait ainsi permettre aux ingénieurs de faire l’expérience de cette opération, et de réinvestir le PDP à partir des critiques faites à son égard.
Toucher les pratiques d’une autre culture de conception
Les activités de médiation au design proposées par le designer chercheur devaient pouvoir faire sens au sein des deux cultures de conception, ingénierie et design, en rendant possible une autre pratique des médias et la génération de concepts exploitables dans un périmètre élargi pour l’entreprise. La thématique a été choisie parmi une liste de sujets perçus comme « innovants » sur lesquels l’équipe voulait travailler. Elle a été pensée comme un « entre-deux », qui ne dérange ni ne conforte trop les ingénieurs dans leurs habitudes. Une progression s’est articulée autour de trois activités, menées en 10 séances, au cours de laquelle les ingénieurs ont problématisé la thématique, formulé des ébauches de concepts, puis des arguments afin de démontrer leur valeur pour l’entreprise.
Chacune des activités s’est incarnée à travers un ensemble d’objets intermédiaires relevant d’opérations de traduction habituellement observées en design. Or, comme les ingénieurs y étaient peu habitués (elles ne renvoyaient pas à leur système de classification), celles-ci ont donné lieu à plusieurs moments et niveaux de négociation, c’est-à-dire d’explicitation des écarts d’interprétation.
Activité 1 : ouvrir et problématiser
Cette activité visait à élargir la première étape du PDP, initialement limitée à une analyse de technologie, vers de nouveaux champs de connaissances pouvant servir de base à la formulation de questions puis de concepts. Différents exercices d’idéation et de catégorisation invitaient les participants à déconstruire la thématique, à en proposer des traductions sous forme de problématiques de conception.
Le travail était orienté sur le vocabulaire employé dans ces questions, afin que les mots deviennent des médias pour l’activité 2. Discutés, analysés, reformulés et représentés dans un diagramme, les mots fonctionnent ainsi comme objets intermédiaires, à la fois résultats d’une activité et données d’entrées de la suivante. Les participants négocient entre eux sur la formulation des problématiques à même de saisir au mieux les enjeux dont elles témoignent.
Activité 2 : traduire et conceptualiser
La formulation d’ébauches de concepts s’appuyait sur la conversation entre participants avec les matériaux issus de l’activité 1. Le cadre conceptuel et fonctionnel de cette activité s’est ainsi construit pas à pas, par le dialogue et l’ajustement. Une phase d’idéation en sous-groupes tournants et en temps limité a d’abord été menée (inspirée de méthodes existantes pour l’itération créative en design). Schémas, esquisses, expressions notées sur des nappes en papier ont permis d’ouvrir les possibilités de réponse.
Puis, ces supports ont été accrochés au mur, supportant une conversation collective visant à débattre et enrichir les ébauches de concepts à poursuivre. Enfin, de nouveaux médias de différentes natures (textes, schémas, images) ont été introduits, afin de stimuler le versionnage le plus libre possible des idées, suivant les étapes de conceptualisation du PDP.
Dans cette activité, la négociation accompagne l’activité d’idéation et de versionnage. Elle porte d’abord sur la façon dont une problématique peut se traduire en concept (conversation entre binômes d’ingénieurs) puis sur les différentes façons d’explorer cette ébauche (collectivement).
Activité 3 : argumenter pour transformer
Dans cette dernière activité, les participants devaient argumenter la valeur potentielle des concepts générés, afin de préparer leur développement et mise en œuvre. Ce travail requiert d’ancrer les propositions dans le contexte de l’entreprise, de les réajuster, jusqu’à en rendre une version légitime auprès des différents acteurs de l’organisation impliqués dans la négociation (marketing, responsables R&D, steering committee). Concrètement, les ingénieurs étaient par exemple invités à réaliser des entretiens pour tester leurs arguments (jusqu’ici, leurs idées étaient systématiquement synthétisées en réunions de validation). Ici, les objets intermédiaires ont poussé les ingénieurs à opérer une traduction à laquelle ils n’étaient pas habitués : s’adapter aux interlocuteurs en présence permet de passer en revue tous les aspects des concepts (technique, commercial, conceptuel, social…), pour choisir des axes de développement. La négociation avec des acteurs inédits interroge alors la capacité de la version retenue à s’ancrer dans le contexte économico-industriel de l’entreprise.
Par ailleurs, dans ces activités, il est à noter que l’espace ne fait pas qu’accueillir d’autres pratiques de conception, mais leur donne corps. Les murs deviennent supports de lecture et d’écriture, les tables réorganisées autorisent une pratique du dessin à grande échelle… Ces objets, habituellement passifs, deviennent également intermédiaires, outils de médiation à de nouvelles pratiques de conception. Ce changement de statut des objets est significatif par rapport au vécu des ingénieurs. Par moments, leur prise en main des médias a donné lieu à des usages inventifs, qui ont déclenché une prise de conscience quant aux limitations et injonctions existantes. Au fur et à mesure de cette appropriation, un autre niveau de négociation est alors intervenu, qui a amené le designer chercheur / animateur à adapter le processus des activités, initialement prévues comme « acculturation » au design. Les discussions, au départ d’ordre plutôt technique, se sont rapidement élargies à la sphère stratégique, transformant la médiation en occasions d’échanges et de débats horizontaux entre participants. L’effet structurant et l’effet d’alignement (Vinck, 2012) des objets intermédiaires ne servent pas ici directement un projet de conception, mais nourrissent la discussion sur les rôles attendus et la légitimité des ingénieurs au sein de l’entreprise. L’explicitation des interprétations que chacun fait du contexte organisationnel représente la première étape d’une transformation.
La rencontre des cultures : émergence du tact dans le processus de médiation
Les différents objets intermédiaires participant de la culture de conception d’une organisation incarnent un système de classifications. Toucher à ces objets met ainsi en question la légitimité et l’identité de ces classifications. Comme spécifié dans la littérature, des outils, principes ou pratiques radicalement différents s’introduisent au risque de tensions. L’enjeu essentiel d’une médiation est ainsi de développer une approche intégrative plutôt que prescriptive. Ceci repose largement sur la posture adoptée, à commencer celle de l’intervenant (ici le designer chercheur). Au fur et à mesure des différentes opérations de traduction et de négociation avec les objets intermédiaires, les rôles des acteurs impliqués (ici les ingénieurs participants) se redéfinissent, ouvrant sur de potentiels changements culturels dans l’organisation. Nous proposons la notion de tact pour rendre compte de l’expérience vécue dans cette intervention, et éclairer les enjeux en termes de posture d’une rencontre entre deux cultures de conception.
Le tact comme attitude pour distribuer l’autorité de la médiation
Faire appel à la notion de tact permet de dépasser la simple application de procédures, l’emploi de moyens pour obtenir un certain résultat. Associant le cognitif, l’émotionnel, l’action et le stratégique, la démarche de design est proprement « tact-ique ». Il s’agit de jongler, en adoptant une posture attentive que Kant (1790/1979) nommait logische Takt, condition a-logique de la pensée. Synonyme d’un toucher délicat, ce tact logique constitue pour le concepteur une manière globale d’habiter son métier :
– Liberté morale – son éthique.
– Création esthétique – ses moyens.
– Acte pratique – sa logique, qui prend donc la forme d’une tactique (de Certeau, 1990).
Pour Eirick Prairat (2007), en sciences de l’éducation, le tact correspond à la capacité de s’ajuster à la situation particulière que l’on est en train de vivre. Mais il est aussi une vertu de la relation, visant à révéler en l’autre des ressources insoupçonnées.
En ce sens, la notion de tact caractérise une attitude pertinente pour le designer chercheur engagé dans une intervention de médiation. La posture juste est délicate à trouver, car dès que l’on met en évidence ou stimule des opérations potentielles dans la manipulation des médias, on prend le risque de faire de ces opérations des protocoles à suivre. Le tact n’est alors pas qu’une qualité humaine, mais une qualité de l’interaction entre individus et médias.
Comme noté plus haut, les objets intermédiaires comme le PDP participent du système de classification existant de l’organisation. Si les nouveaux formats, issus de la culture de conception du design et proposés durant les séances, s’en échappent, ils véhiculent néanmoins eux-mêmes une autre autorité potentielle qu’il n’aurait pas fallu imposer aux ingénieurs. L’enjeu était au contraire que ceux-ci opèrent un retour réflexif sur leur rôle lorsqu’ils se trouvent confrontés à une culture de conception qui n’est pas la leur, mais qui pourrait en faire partie.
L’opacité des objets intermédiaires permet de porter d’autres points de vue, inhérents à la pratique de conception en design, et de mettre en scène une telle confrontation culturelle par l’intermédiaire de situation de négociation. Le rôle de médiateur décrit par Vinck (2009) s’étend ainsi au regard porté sur les pratiques de conception et leurs spécificités disciplinaires. Pour maintenir ce regard, le designer chercheur a dû faire évoluer sa posture, le rôle pédagogique qu’il assumait initialement ne permettant pas suffisamment aux participants de se comporter comme véritables acteurs des situations de travail proposées. Essayer de trop faciliter le passage d’une culture à une autre, c’était risquer que les ingénieurs ne s’emparent pas des effets transformateurs dans leur pratique à long terme. L’objectif n’était pas de les former au design, mais de les laisser “converser” avec les potentiels des médias, en se retirant petit à petit.
Ce passage correspond à celui de l’animateur au médiateur. Alors que l’animateur représente une figure d’expert, chargé de nourrir le groupe, le médiateur cherche à rendre les acteurs en présence (humains comme non-humains) co-auteurs de la situation (Jeantet, 1998). L’évolution s’est ici opérée par ajustements progressifs, alors que le designer chercheur modifiait sa façon d’interagir avec les participants. À la fin des activités, certains ont relevé que son nouveau rôle de « candide », posant davantage de questions de compréhension, leur permettait de mieux saisir ce qu’ils recherchaient au cours du processus de conception. Réciproquement, l’implication des participants a ainsi pu se développer jusqu’à ce qu’ils portent de manière partagée une responsabilité, une fonction auteur.
En s’appropriant les différents médias, en les utilisant de manière critique et créative, les ingénieurs ont pu équiper par eux-mêmes les objets intermédiaires d’une structure minimale reconnaissable qui leur soit propre. C’est de cette manière que l’autorité portée par les médias (comme le PDP) peut se distribuer entre les équipes.
Il ne s’agit pas ici de conclure à des résultats univoques et généralisables, mais d’observer l’intervention sous un nouvel angle. L’approche tact-ique s’attache moins aux procédures et produits qu’à la transformation vécue par les participants. Si les concepts nés de cette expérimentation n’ont finalement pas été développés, la prise de conscience des ingénieurs est l’effet principal et donc un enjeu central à la rencontre entre deux cultures de conception.
Assumer l’hétérogénéité
La notion de tact implique une dynamique. Jamais statique, chaque acteur participe à l’ajustement constant et à la construction d’un processus de signification. Cette dimension motrice d’un changement potentiel prévaut dans l’entrée en dialogue de deux cultures de conception. Cette rencontre peut s’appuyer sur la générativité des objets intermédiaires utilisés comme supports d’exploration et d’expérimentation.
Au plan sémiotique, le tact permet de « maintenir des potentialités multiples dans le processus de signification » (le Marec, 2013, p. 17). Il représente ainsi une posture pertinente dans la mise en jeu d’objets intermédiaires de conception. En se laissant approprier, codifier et manipuler, ces objets deviennent supports de potentialités, à la rencontre des cultures. Il s’agit de saisir des occasions et de s’insinuer, dans un processus proprement tactique (de Certeau, 1990). Laisser le tact s’exprimer signifie donc quitter une posture surplombante d’expertise (que ce soit en tant que concepteur pour les ingénieurs ou en tant qu’animateur pour le designer chercheur), pour s’ouvrir à l’hétérogène. Ici réside le premier pas d’un changement culturel, non pour remplacer mais pour enrichir, par le dialogue, la culture dans laquelle les acteurs évoluent.
Dans l’intervention décrite, il était important que les ingénieurs puissent investir une autre pratique de conception de façon non prescrite, c’est-à-dire sans démontrer de sa supériorité. Les méthodes et outils relevant du design ont alors pu être mobilisés au-delà de leur dimension instrumentale, ce qui a permis de déplacer l’enjeu de ces sessions sur un aspect moins technique que culturel. Dans l’ouverture sémiotique, les ingénieurs comme le designer chercheur se sont laissé transporter. Il ne s’agit pas de nier l’hétérogénéité qui existe entre eux, ni de revendiquer le remplacement d’une culture de conception par une autre, mais bien d’assumer cette ouverture. C’est ainsi que les pratiques de chacun, relevant de la conception réglée ou exploratoire, s’en sont trouvées modifiées. Depuis cette expérimentation par exemple, le designer chercheur s’est approprié quelques-uns des outils de gestion de projet observés dans l’entreprise ; alors qu’un nouveau lieu aux propriétés inédites a été construit au sein de la R&D afin de faciliter le travail collaboratif des ingénieurs.
Ces résultats doivent être nuancés par le fait que les effets transformateurs se limitent à ceux ayant vécu l’expérience. La diffusion de nouvelles pratiques et leur soutien à l’échelle globale de l’organisation restent des sujets ouverts. Néanmoins, on constate qu’un espace de médiation s’est créé, dans lequel les dynamiques sociales, les représentations et les identités déjà constituées pourront être discutées et évoluer. Nous faisons ainsi écho à la conclusion de Paul Rasse (2000) concernant la médiation : « espace où le public se fixe l’exigence de participer à la culture, parfois comme ignorant confronté à des sujets qu’il ne connaît pas, mais toujours en mesure de les discuter à partir de ce qu’il est lui-même » (p. 48). Les différentes situations de médiation avec les ingénieurs peuvent ainsi se lire comme des moments où chacun accepte de se confronter à l’autre et à l’inconnu présent dans une évolution possible, et se tient prêt à en discuter les enjeux pour lui-même.
En réponse à l’injonction paradoxale adressée par l’organisation, le tact propose le choix de se positionner en conscience, outillée par la médiation. Celle-ci ne représente donc pas une méthode à appliquer, mais une expérience à vivre. Se laisser transformer ou pas relève des participants.
Conclusion : De la médiation à la transformation
Cette recherche visait à comprendre ce qui émerge de la rencontre entre deux cultures de conception dans le cadre d’une injonction à l’innovation. Si le design thinking est présenté comme une boîte à outils mobilisable dans ces situations, il ne doit pas faire l’économie d’une posture de tact. Susciter le changement c’est aussi accepter que ce changement ne soit pas celui auquel on s’attendait.
Envisager le tact comme posture permet de supporter un dialogue avec la normalisation des pratiques de conception et leur stabilisation dans le temps. En ne s’imposant pas et en gardant un lien avec la culture d’origine, une autre culture de conception peut s’insérer dans le système de classifications d’une organisation, stimulant en retour une posture réflexive. Dans notre cas, la médiation entre ingénieurs et pratiques relevant du design a permis de libérer un potentiel de changement, qui s’est amorcé bilatéralement.
Au designer chercheur, la nécessité de tact découverte sur le terrain a enseigné les enjeux de la posture de médiation : l’ajustement, la juste distance aux autres, afin de jouer un rôle maïeutique. Dans le cadre de cette recherche, une future étude pourrait s’attacher à qualifier ce rôle dans le contexte spécifique d’une rencontre culturelle entre ingénierie et design.
Quant au vécu des participants, il est caractéristique de l’apprentissage par l’expérience, témoignant d’une appropriation critique et créative des outils qui leur sont proposés. Petit à petit, les ingénieurs ont ainsi articulé action et réflexion de manière itérative. Au-delà de leurs pratiques, ce sont leurs cadres de référence qui ont évolué. Selon Jack Mezirow (1997), une telle transformation apprenante est un processus à la fois intime et communicationnel, qui repose sur quatre étapes :
– La réflexion critique sur ses assomptions.
– Le questionnement de ses croyances par le discours.
– La mise en action réflexive.
– L’évaluation critique.
Une médiation est attendue en amont (pour identifier et examiner les assomptions), puis en aval (pour évaluer de manière critique les nouvelles connaissances qui émergent). Si le premier rôle était au cœur de cette étude, le second n’a pas été abordé. Une étude s’attachant aux marqueurs de l’évolution culturelle dans l’organisation prolongerait pertinemment cette recherche.
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Auteurs
Dorian Reunkrilerk
Dorian Reunkrilerk est doctorant en Sciences de l’information et de la communication et design au sein du Codesign Lab & Media Studies de Télécom Paris. Il poursuit une thèse CIFRE rattachée au laboratoire commun EXALT Design Lab
Estelle Berger
Estelle Berger est designer et enseignante chercheuse qualifiée en Sciences de l’information et de la communication et Arts, à Strate École de design. Elle dirige le laboratoire commun EXALT Design Lab.
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