Comment l’esprit prend-il des décisions ? Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous apprenons ? Comprendre ce qui se cache derrière le mot cognition aide à répondre à ces questions, à affronter des enjeux de santé publique et à interroger les limites de notre humanité à l’heure où se développe l’intelligence artificielle.
Quand on parle de cognition, on évoque souvent des domaines complexes comme la psychologie, les neurosciences, voire l’intelligence artificielle. Mais qu’est-ce que la cognition, au juste ?
Dit simplement, c’est ce qui se passe dans notre tête quand on comprend, qu’on apprend, qu’on prend une décision. C’est une sorte de « laboratoire intérieur » où chaque pensée, souvenir ou perception s’élabore. En d’autres termes, c’est l’ensemble des mécanismes qui nous permettent de traiter l’information autour de nous.
Le terme cognition vient du latin « cognitio », signifiant « connaissance ». D’abord employé en philosophie pour parler des mécanismes de la pensée humaine, il a été repris au XXe siècle par les psychologues pour explorer les fonctions cognitives du cerveau, et finalement par les neurosciences, qui cherchent aujourd’hui à « cartographier » ce laboratoire intérieur, région par région.
À l’heure où l’intelligence artificielle cherche à imiter nos capacités mentales, comprendre la cognition humaine est essentiel. Que signifie « penser » ? Comment l’esprit prend-il des décisions ? Et comment l’apprentissage s’effectue-t-il, qu’il soit humain ou artificiel ?
Les enjeux derrière la cognition aujourd’hui
La cognition est au cœur de notre quotidien : lorsque nous lisons un livre, notre cerveau utilise des processus cognitifs pour décoder les lettres, donner un sens aux mots et comprendre des idées abstraites. Derrière le volant, notre attention, notre mémoire et notre coordination fonctionnent ensemble pour prendre des décisions en quelques secondes.
Notre cognition nous permet ainsi d’accomplir des tâches simples et complexes, souvent sans que nous en soyons conscients.
Dans le domaine de l’éducation, des chercheurs comme Stanislas Dehaene (auteur de La Bosse des maths ou Apprendre à lire : des sciences cognitives à la salle de classe), ont montré que certaines stratégies cognitives sont plus efficaces que d’autres pour apprendre. Savoir que l’attention fonctionne par cycles et que la répétition espacée consolide mieux les souvenirs peut aider à repenser la façon dont on enseigne.
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Les neurosciences et la psychologie cognitive s’intéressent aussi à la prise de décision, un autre aspect fondamental de la cognition. Des chercheurs comme Daniel Kahneman (auteur de Thinking, Fast and Slow) ont montré que notre cerveau utilise des raccourcis mentaux, appelés biais cognitifs, pour traiter l’information rapidement.
Bien que ces biais soient parfois utiles, ils peuvent aussi mener à des erreurs, en renforçant par exemple des préjugés ou en nous poussant à privilégier des solutions rapides mais imparfaites. Ce champ d’études aide ainsi à comprendre comment nos jugements peuvent parfois être manipulés ou pourquoi nous agissons parfois contre notre propre intérêt.
Cognition : des défis pour l’avenir
Étudier la cognition, c’est aussi mieux comprendre les défis que posent certaines pathologies pour mieux les prendre en charge demain. Les troubles neurocognitifs, comme la maladie d’Alzheimer, impactent notamment la mémoire et l’orientation spatiale, des fonctions essentielles à notre autonomie.
Grâce aux avancées scientifiques, il devient possible de détecter ces troubles plus tôt et d’imaginer des interventions mieux ciblées, qu’il s’agisse de prise en charge ou d’aménagements adaptés, pour préserver la qualité de vie des patients.
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Dans un autre registre, la cognition inspire aujourd’hui les nouvelles technologies, notamment l’intelligence artificielle (IA). En modélisant les mécanismes de pensée humaine, l’IA cherche à reproduire nos capacités de raisonnement, d’apprentissage et de prise de décision. Ces innovations promettent de révolutionner de nombreux domaines, mais elles posent aussi une question fondamentale : jusqu’où l’IA peut-elle imiter, ou même dépasser, notre esprit ?
Comprendre la cognition, c’est donc à la fois un moyen de répondre aux enjeux de santé publique mais aussi une façon d’explorer les limites de notre humanité. Après tout, c’est en la comprenant mieux que nous pourrons peut-être penser différemment demain.
Béatrice Degraeve ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
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