Apprentissage immersif, expérientiel, « action learning »… les méthodes pédagogiques innovantes ont fleuri au cours de ces dernières années de sorte qu’on ne parle désormais plus d’apprentissage mais d’expérience d’apprentissage. Changeant de posture, l’étudiant et l’enseignant s’inscrivent désormais, tous deux, dans une démarche de co-construction de la connaissance et de la compétence.
Quelles seraient les vertus de ces innovations pédagogiques ? Dans quelle mesure seraient-elles plus efficaces que les méthodes traditionnelles ? À ce titre, doit-on nécessairement opposer innovation pédagogique et méthodes traditionnelles d’apprentissage ? N’y aurait-il pas en définitive complémentarité entre les deux modalités d’apprentissage ?
Afin d’apporter un éclairage sur ces questions, le département marketing de Paris School of Business a réalisé une expérimentation basée sur l’intégration de la réalité virtuelle dans les processus d’apprentissage. En effet, cette dernière, permet à ses utilisateurs de vivre une expérience sensorielle unique, en les immergeant dans un environnement avec lequel ils vont pouvoir interagir.
Transposée à la pédagogie, la réalité virtuelle permet aux étudiants de s’immerger virtuellement dans un environnement dont ils vont devoir décrypter les principales caractéristiques et concepts-clés. Ces dernières années ont vu se développer l’apprentissage expérientiel dans les universités, écoles, entreprises, organismes de formation entre autres. En effet, en vertu du cône de l’apprentissage de Dale, il semblerait que les individus retiennent généralement 10 % de ce qu’ils ont lu contre 50 % de ce qu’ils ont vu ou entendu.
Travail de groupe
Cette expérience d’intégration de la VR dans les enseignements du département marketing a concerné 215 étudiants du programme « Grande École », de la première à la troisième année. Au sein de chacune des classes concernées, des groupes de travail ont été constitués pour générer une atmosphère propice aux échanges – autour, le cas présent, de l’évaluation d’un point de vente Franprix.
L’intégration de la réalité virtuelle ou de toute autre technique immersive ne peut se suffire à elle seule et nécessite, de la part des enseignants, de penser et de construire une véritable scénarisation pédagogique, cohérente et au service de l’acquisition de la connaissance et de la compétence.
Aussi, à l’issue de l’expérimentation de la réalité virtuelle par les étudiants, des ateliers de travail collaboratif ont été mis en place et ont ainsi permis aux enseignants de guider les étudiants dans la co-construction de la connaissance et des concepts clés mobilisés au cours de la séance.
Le caractère original et novateur de cette expérience pédagogique a principalement consisté à mettre en place un plan expérimental permettant de mesurer l’impact de l’utilisation de la VR sur l’expérience d’apprentissage des étudiants, entendue à la fois comme l’acquisition des connaissances mais également des compétences. Pour ce faire, deux modalités d’apprentissage ont été testées.
La première modalité avait pour objectif d’évaluer les connaissances acquises par les étudiants suite à l’expérience VR, et portait notamment sur la maîtrise, par ces derniers, des éléments caractéristiques du point de vente, de la structuration et du fonctionnement du merchandising (agencement spatial des rayons, organisation des produits dans les rayons, propreté du magasin…), mais aussi de l’argumentaire de vente. Pour ce faire, le niveau de connaissance des étudiants a été testé par le biais d’une comparaison avant/après utilisation de la VR.
La seconde modalité avait quant à elle pour objectif d’évaluer l’aptitude des étudiants à réaliser une étude de marché et à définir une problématique marketing. Cette modalité a été testée à l’aide d’un comparatif pré/post VR.
Complémentarité des apprentissages
À l’issue de chaque expérience VR, un plan expérimental a été mis en place, permettant ainsi de mesurer l’impact de l’utilisation de la VR sur l’expérience d’apprentissage des étudiants aussi bien en termes d’acquisition de connaissances (modalité 1), qu’en termes de développement de compétences (modalité 2).
S’agissant de l’évaluation des connaissances, la comparaison de moyennes effectuée a permis de mettre en évidence l’impact positif de l’association entre le cours traditionnel et l’utilisation de la VR. Ces premiers résultats mettent en exergue l’idée selon laquelle il existerait une complémentarité entre apprentissage traditionnel et apprentissage immersif.
L’association de ces deux méthodes pédagogiques permet semble-t-il, aux étudiants, de mieux appréhender la connaissance. La comparaison de moyennes réalisée dans le cadre de l’évaluation des compétences montre une nette amélioration de la qualité du travail rendu suite à l’utilisation de la réalité virtuelle.
L’apprentissage immersif tel que proposé par la réalité virtuelle est ainsi mis au service de l’expérience pédagogique dans la mesure où il permet d’accroître la performance pédagogique. Outre l’impact en termes d’acquisition des connaissances/compétences par les étudiants, l’étude s’est également intéressée à la mesure de la satisfaction de ces derniers.
Perception positive
Dans quelle mesure l’intégration de la réalité virtuelle dans les enseignements peut-elle contribuer à innover l’offre pédagogique proposée aux étudiants ? Comment cette pratique peut-elle être perçue, par ces derniers ? Quelle est son influence sur l’amélioration des méthodes pédagogiques et, in fine, la satisfaction globale des étudiants durant leur apprentissage ?
Ces questions sont fondamentales car elles nous permettent de mieux évaluer le ROI (retour sur investissement) pour les étudiants, les entreprises et les établissements de formation, au travers de l’implémentation de la réalité virtuelle dans les enseignements.
Dans le cas précis du projet d’innovation pédagogique entrepris par Paris School of Business, l’objectif était de mesurer l’impact de l’utilisation de la réalité virtuelle sur la satisfaction des étudiants durant l’expérience d’apprentissage. Pour ce faire, un protocole expérimental, fondé sur différents scénarios « utilisation de la réalité virtuelle versus son absence » et une étude quantitative ont été élaborés.
En effet, un questionnaire en ligne, incluant des questions issues des écrits scientifiques spécialisés et portant sur la satisfaction perçue, a été administré auprès de 145 étudiants du programme grande école. Les étudiants devaient notamment indiquer leur degré de satisfaction à l’égard de l’expérience d’utilisation de la réalité virtuelle durant les enseignements en répondant à la question suivante « je suis globalement satisfait de l’expérience d’utilisation de la réalité virtuelle dans le cadre du cours » et mesurée sur une échelle de graduations allant de 1 (« pas du tout d’accord ») à 5 (« tout à fait d’accord »).
Les résultats statistiques sont intéressants. Ils montrent que la majorité des étudiants (89 %) étaient satisfaits de cette expérience d’innovation pédagogique. Les étudiants estiment que l’utilisation de la réalité virtuelle (versus son absence) améliore significativement leur satisfaction. Ceci témoigne de la sensibilité avérée des étudiants pour ce type d’innovation.
Ainsi, à l’heure où les établissements de formations (écoles de commerce, universités…) cherchent désormais à produire des expériences pédagogiques novatrices, ludiques, constructives, dynamiques et sources de satisfaction, le déploiement de la réalité virtuelle tout au long du processus d’apprentissage peut compléter les autres dispositifs pédagogiques (interactions en face à face, ouvrages, cours traditionnels…).
Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.
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