Un texte repris du site Distances et Médiations des Savoirs
Thème de l’appel à contributions
Créée lors du Forum UNESCO de 2002 sur l’impact des didacticiels libres, l’expression « ressources éducatives libres » (REL) désigne « des matériels d’enseignement, d’apprentissage et de recherche sur tout support, numérique ou autre, existant dans le domaine public ou publiés sous une licence ouverte permettant l’accès, l’utilisation, l’adaptation et la redistribution gratuits par d’autres, sans restrictions ou avec des restrictions limitées » (Déclaration de Paris sur les REL, 2012 [1]). Pour citer l’exemple de l’enseignement supérieur français et international, le développement des REL a donné lieu à de multiples initiatives et projets de nature institutionnelle : universités numériques thématiques (UNT), plateformes FUN-MOOC et FutureLearn, vidéothèque numérique CANAL-U et moteur national d’indexation de REL [2]en France, bibliothèque numérique de l’espace universitaire francophone BNEUF [3] portée par l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), portail de ressources californien MERLOT [4] (Multimedia Educational Resource for Learning and On-Line Teaching), coalition internationale SPARC (Scholarly Publishing and Academic Resources Coalition) ou réseau mondial de l’Open Education Consortium [5], pour ne citer qu’eux. Par leurs caractéristiques intrinsèques, les REL affichent une forte similarité avec les Learning Objects, issus du paradigme orienté objet en informatique, et permettant la réutilisation d’objets numériques d’apprentissage de granularité fine dans de multiples contextes d’enseignement et de formation, et selon un mode de distribution à la fois décentralisé (via l’internet) et collaboratif. Elles ont également fait l’objet de la publication en cinq langues d’un référentiel de compétences [6] par l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) en 2016, « dans l’optique de développer des formations pouvant s’adresser à des publics variés, et afin de transmettre les quatre compétences fondamentales que sont la recherche, la réutilisation, la conception et la diffusion des REL ».
Pourtant, malgré ce contexte et ces principes potentiellement fédérateurs, les REL peinent à se développer dans les usages pédagogiques des enseignants ou formateurs engagés dans des dispositifs de formation ouverte et à distance (en ligne ou hybrides). Plusieurs raisons sont évoquées pour expliquer ce non-usage (Petit, 2008 ; 2009 ; Browne et al, 2010 ; Weller, 2014a) : difficultés liées à la technologie, aux plateformes, à la localisation ou à l’indexation des REL ; chaîne de production éditoriale incorporant une médiation et une scénarisation pédagogiques préconçues ; granularité pas assez forte ni standardisée ; ressources créées pour un usage pédagogique trop fortement contextualisé ou personnalisé (selon les besoins d’un auteur-concepteur et non d’un public potentiellement plus large) ; qualité variable des ressources et manque de confiance dans les sources exploitées par les REL ; raisons intrinsèques liées aux valeurs et convictions des enseignants (préférence pour créer son propre matériel, crainte du mésusage) ; manque de stratégies institutionnelles au sein des établissements pour valoriser et encourager la réutilisation et le partage des REL par leurs enseignants ; méconnaissance et incertitudes envers les licences ouvertes…
Jusqu’à présent, les travaux de recherche en formation ouverte et à distance se sont penchés sur l’évaluation de projets liés à la création, l’utilisation et le partage des REL (Butcher, 2015). Plus récemment, certains suggèrent de dépasser le seuil des REL (open education resources) à proprement parler, pour se pencher sur les pratiques pédagogiques liées aux REL (open educational practices ou open pedagogy), et en évaluer l’impact sur l’enseignement et l’apprentissage (Ehlers, 2011 ; Cox et Trotter, 2017 ; DeRosa et Robison, 2017 ; Schuwer et Janssen, 2018). Dans les institutions où les REL sont utilisées par les enseignants, ceux-ci se les réapproprient sans forcément les partager par la suite. Il faut donc certainement nuancer ce constat de non-usage apparent, ou le repenser autrement (Kellner, Massou, Morelli, 2010 ; Marquet, 2012), car la réappropriation des REL n’est pas forcément visible en dehors des dispositifs ou contextes locaux de formation ouverte et à distance. Une absence de visibilité n’est donc pas forcément synonyme d’absence d’impact sur les pratiques pédagogiques, et sur l’éducation en général (Weller, 2014b ; Weller et al, 2015).
Ce dossier a donc pour objectif de questionner la réappropriation des REL et leur impact sur les pratiques pédagogiques de formation ouverte et à distance, en ligne ou hybride. Il privilégiera des études critiques proposant une analyse à la fois documentée et fondée sur des données d’usage pédagogique - ou de non-usage - collectées en contexte réel, et pouvant couvrir différentes thématiques sur les REL : réappropriation, adaptation, re-conception, co-création, partage, rediffusion, collaboration, traduction, localisation.
Thèmes possibles
Parmi les questions qui pourront être abordées, figurent (liste indicative) :
– quelles sont les différentes formes de réappropriation des REL dans l’éducation formelle incluant de la distance ?
– quelles sont les motivations des enseignants à utiliser et réutiliser des REL ?
– quels sont les critères de sélection et d’évaluation d’une REL chez les enseignants ? Correspondent-ils aux qualités d’une REL identifiées par les travaux de recherche ?
– quels bénéfices retirent-ils de cette réappropriation (impact sur leur enseignement, qualité des apprentissages…) ?
– quels sont les facteurs explicatifs de la non-redistribution en ligne des ressources ainsi réappropriées ?
– comment observer et analyser ces processus de réappropriation dans le contexte spécifique de la formation à distance ?
Références
Browne, T., Holding, R., Howell, A. et Rodway-Dyer, S. (2010). The challenges of OER to Academic Practice. Journal of Interactive Media in Education, 1. Repéré sur : http://doi.org/10.5334/2010-3
Butcher, N. (2015). A basic guide to open educational resources (OER). Report for the Commonwealth of Learning and UNESCO. Repéré sur le site de l’UNESCO : http://unesdoc.unesco.org/images/0021/002158/215804e.pdf
Cox, G. et Trotter, H. (2017). Factors shaping lecturers’ adoption of OER at three South African universities. Dans C. Hodgkinson-Williams et P. Arinto (eds.), Adoption and impact of OER in the Global South (p. 287-347). Repéré sur : http://doi.org/10.5281/zenodo.601935
De Rosa, R. et Robison S. (2017). From OER to Open Pedagogy : Harnessing the Power of Open. Dans R. Jhangiani et R. Biswas-Diener (eds.), Open : The Philosophy and Practices that are Revolutionizing Education and Science (p. 115-124). London : Ubiquity Press. Repéré sur le site : https://oerknowledgecloud.org/sites/oerknowledgecloud.org/files/open.pdf
Ehlers, U-D. (2011). Extending the territory : From Open Educational Resources to Open Educational Practices. Journal of Open, Flexible, and Distance Learning, vol. 15, 2, 1-10. Repéré sur le site : https://files.eric.ed.gov/fulltext/EJ1079969.pdf
Kellner, C, Massou, L. et Morelli, P. (2010). (Re)penser le non-usage des TIC. Questions de communication, 18. Repéré sur le site de la revue : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/395
Marquet, P. (2012). Les non-usages des TIC : modélisations, explications, remédiations, Recherches & éducations, 6. Repéré sur le site de la revue : http://journals.openedition.org/rechercheseducations/932
Petit, L. (2008). Enjeux de la conception des ressources pédagogiques numériques dans l’enseignement supérieur. Le cas de l’Université en ligne (UEL). Distances et savoirs, vol 6, 4, 547-564. Repéré sur le site de la revue : https://ds.revuesonline.com/article.jsp?articleId=13041
Petit, L. (2009). Les conditions de l’usage des ressources pédagogiques numériques. Questions de communication, 16. Repéré sur le site de la revue : http://questionsdecommunication.revues.org/362
Schuwer, R. et Janssen, B. (2018). Adoption of sharing and reuse of open resources by educators in higher education institutions in the Netherlands : A qualitative research of practices, motives, and conditions. International Review of Research in Open and Distributed Learning, vol. 19, 3, 151-171. Repéré sur le site : http://dx.doi.org/10.19173/irrodl.v19i3.3390
Weller, M. (2014a). The Battle For Open : How openness won and why it doesn’t feel like victory. London : Ubiquity Press. Repéré sur le site de l’éditeur : https://www.ubiquitypress.com/site/books/10.5334/bam/
Weller, M. (2014b). It’s not reuse, it’s adaptation. The Ed Techie, 29 September. Repéré sur le blog : http://blog.edtechie.net/oer/its-not-reuse-its-adaptation/
Weller, M., de los Arcos, B., Farrow, R., Pitt, R. et McAndrew, P. (2015). The Impact of OER on Teaching and Learning Practice. Open Praxis, vol. 7, 4, 351-361. Repéré sur le site de la revue : http://oro.open.ac.uk/44963/1/227-1106-2-PB-3.pdf
Remarques concernant la rédaction des textes
Les articles devront se plier aux exigences scientifiques : formulation des hypothèses ou objectifs de recherche, méthodologie ou méthodes mises en œuvre, références aux travaux comparables, mention des contextes (dont publics, institutions, dispositifs, technologies, etc.), résultats obtenus et mis en perspective. Les articles doivent être lisibles par les spécialistes, chercheurs et experts appartenant aux différentes disciplines visées par Distances et médiations des savoirs.
Les propositions d’articles doivent respecter le format et la ligne éditoriale demandés par la revue Distances et Médiations des Savoirs : http://dms.revues.org/75 ; soit des articles de recherche, généralement de 20 à 25 pages, 30 000 à 50 000 signes (notes et espaces compris) répondant aux exigences académiques. Ces articles seront évalués en double aveugle par les membres du comité scientifique et ne seront publiés qu’après acceptation et révisions éventuelles.
Calendrier des étapes de l’appel
Pour ce numéro thématique, une manifestation d’intérêt sur la base d’un résumé d’environ 2 pages doit être envoyée avant le 30 avril 2019, conjointement à :
Luc Massou luc.massou@univ-lorraine.fr ; Cathia Papi cathia.papi@teluq.ca ; Hélène Pulker helene.pulker@open.ac.uk
Et DMS, dms-dmk@cned.fr
– 28 février 2019 : mise en ligne de l’appel à articles
– 30 avril 2019 : réception des propositions sous la forme d’une à deux pages
– 30 mai 2019 : notification aux auteurs sur la base des résumés
– 30 août 2019 : réception des articles complets
– Octobre 2019 : notification aux auteurs
- 1er ou 2ème semestre 2020 : publication du numéro.
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