Un article repris du magazine The Conversation, une publication sus licence CC by nd
Depuis la loi du 22 juillet 2013, toutes les universités doivent mettre en place un accueil et un accompagnement dédiés aux jeunes souffrant de maladie chronique ou de handicap, sous la forme d’un schéma directeur pluriannuel. Elles ont donc, au minimum, un responsable identifié qui porte cette politique. Mais les écarts d’organisation sont importants d’un établissement à l’autre.
Bien que chaque université possède une structure (ou au moins un interlocuteur) dédiée à la compensation du handicap, la diversité du système universitaire complexifie l’harmonisation des ressources et protocoles. Et c’est là toute la difficulté pour les étudiants concernés, qui se retrouvent bien souvent perdus dans les démarches multiples à réaliser afin de bénéficier d’une aide et de compensations.
C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles près de la moitié des étudiants porteurs d’une maladie chronique grave n’ont jamais fait appel au service universitaire spécifique de leur établissement.
Pour bien comprendre les difficultés de ces démarches, prenons le cas de Léa, jeune femme fictive néanmoins représentative d’une bonne partie des jeunes rencontrés durant mes travaux de recherche. Elle est étudiante à partir de la rentrée prochaine. Atteinte d’une maladie chronique, elle a besoin d’un accompagnement de la part de l’université pour adapter sa scolarité. Comment doit-elle procéder ?
Du lycée à l’université
Le passage du lycée à l’enseignement supérieur est complexe pour tout jeune adulte et d’autant plus difficile à gérer lorsque l’on est atteint d’une maladie chronique. Au lycée, Léa avait droit à des aménagements. Elle avait un PAI (Projet d’Accueil individualisé) qui listait les adaptations dont elle pouvait bénéficier pour compenser ses troubles de santé. Ce type de dispositif est protocolisé selon des directives nationales.
Le milieu du supérieur est quant à lui trop vaste pour s’accorder sur un seul type de politique handicap. Il répertorie un ensemble d’établissements pluriels avec des structures de rattachements diverses. Une base commune est exigée, mais chaque université et école du supérieur propose des aides inclusives spécifiques. Léa va devoir prendre connaissance, auprès d’un interlocuteur ou d’une structure d’accueil, des services existants et des démarches à effectuer.
Elle est étudiante avant d’être malade. Elle devra donc remplir toutes les démarches qui incombent à l’ensemble des étudiants. Et avec la même autonomie, elle devra solliciter elle-même les aides universitaires pouvant être proposées au regard de ses problématiques de santé.
Des dispositifs évolutifs
Les aides potentielles sont nombreuses. Elles sont de l’ordre de l’accessibilité, de l’accompagnement pédagogique, de l’aide technique et humaine, ou encore de l’aménagement de l’emploi du temps et des examens.
Pour prendre des exemples plus spécifiques, cela peut être de la prise de note, de l’interprétation en langue des signes française et de l’adaptation de documents (agrandissement de caractères, mise en braille, synthèse vocale, etc.).
De manière générale, les aménagements proposés sont décidés en concertation avec l’étudiant ou l’étudiante pour qu’il ou elle soit au cœur de son accompagnement. Il ne faut pas trop tarder à entamer ses démarches, car on doit compter un certain délai pour que les compensations se concrétisent.
Dans la situation de Léa, la maladie est chronique et peut donc évoluer au cours de l’année et lui provoquer d’autres effets qui nécessiteront des aménagements supplémentaires. Dans ce cas, elle pourra réaliser un nouveau recours, car les aides sont évolutives au regard de la situation et de l’évènement de santé.
C’est d’ailleurs pour cette raison que les malades chroniques ne sont pas les seuls à être concernés par cet accompagnement. Tout étudiant présentant un trouble de santé entravant de manière permanente ou temporaire sa capacité à assister aux cours et à apprendre peut bénéficier de compensations et doit donc solliciter son université ou école du supérieur.
Déjouer l’autocensure
L’un des écueils, d’ailleurs, est que beaucoup d’étudiants ne se sentent pas concernés quand ils entendent parler de « service handicap ». Or, la plupart des services universitaires étiquetés de la sorte ne sont pas réservés aux étudiants bénéficiant d’une reconnaissance de situation de handicap. Tout besoin spécifique (même ponctuel, dans le cas d’une fracture, par exemple) peut être accompagné par ces dispositifs. La maladie chronique est d’ailleurs catégorisée comme une situation de handicap par le milieu universitaire.
La grande hétérogénéité du système de l’enseignement supérieur impose aux étudiants présentant des besoins particuliers une autonomie dans les démarches à réaliser. S’il existe, comme nous l’avons vu, toute une palette de dispositifs, ceux-ci demeurent trop souvent méconnus.
Pour les lycéens présentant des besoins éducatifs particuliers qui liraient cet article, il est bon de rappeler qu’il est important de prendre connaissance des dispositifs existants dans les écoles des filières qui les intéressent, le plus tôt possible. Nombreux sont les étudiants que j’ai interrogés qui se sont interdits des formations, pensant qu’elles ne leur étaient pas accessibles.
Des réformes visent à faciliter la transition entre l’enseignement secondaire et tertiaire. Des rapprochements existent entre le lycée et l’enseignement supérieur, notamment les évènements de type « portes ouvertes » organisés par les universités. Toutefois, ceux-ci n’évoquent pas suffisamment les dispositifs d’aide liés aux handicaps. La recherche d’informations ciblées sur les compensations existantes nécessite un investissement personnel de la part des lycéens concernés.
Le Fonds Social Européen et la Région Nouvelle-Aquitaine ont fourni des financements au projet sur lequel a été rattaché le contrat doctoral de Lucas Sivilotti.
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