Azzedine Hajji & Michel Sylin
Université libre de Bruxelles, centre de recherche en psychologie des organisations et des institutions
azzedine.hajji [at] ulb.be ; michel.sylin [at] ulb.be
1. Introduction
Cet article a pour objectif de décrire et analyser un nouveau dispositif pédagogique mis en place dans le cadre des bacheliers en sciences psychologiques et de l’éducation au sein de l’Université libre de Bruxelles (ULB).
Le texte débute par une introduction précisant le cadre théorique et conceptuel que nous entendons mobiliser pour analyser et comprendre certains enjeux sous-jacents. Il s’articule principalement autour de deux concepts : le réflexivité comme démarche intellectuelle et le malentendu comme écueil possible dans les processus d’enseignement-apprentissage.
Le dispositif pédagogique fait ensuite l’objet d’une description qui le replace dans le contexte plus large d’une réforme curriculaire au sein de la Faculté des sciences psychologiques et de l’éducation à l’ULB.
Nous poursuivons ensuite avec une analyse critique du dispositif servant d’appui à l’élaboration d’une ébauche de problématique. L’étude des effets concrets du dispositif pédagogique peut alors s’appuyer sur ce travail pour concevoir des instruments de recueil de données pertinents.
Nous terminons enfin par une brève conclusion rappelant les enjeux sous-jacents à la démarche pédagogique et de recherche mis en œuvre.
2. Cadre théorique et conceptuel
2.1. Le concept de malentendu
Nous mobilisons la notion de malentendu au sens où l’entendent Bautier et Rayou (2013) pour décrire certaines difficultés d’intercompréhension entre enseignant·e·s et étudiant·e·s. Ces difficultés concernent notamment la compréhension adéquate des exigences académiques et des postures épistémiques afférentes, d’une part, et l’interprétation adéquate, la réception, qu’en font les étudiant·e·s, d’autre part, compte tenu de leurs conceptions épistémiques préalables. Dans ce cadre, ces chercheur·se·s mettent en avant, entre autres, une tendance à proposer davantage de dispositifs d’enseignement cherchant à rendre les apprenant·e·s « actif·ve·s » dans leurs apprentissages. Leur engagement autonome dans le travail est ainsi valorisé, les apprenant·e·s étant encouragé·e·s à être moins dépendant·e·s du jugement professoral. Cette exigence s’inscrit également dans la volonté de faire entrer les apprenant·e·s dans une démarche d’apprentissage inductive, l’effectuation de la tâche étant supposée induire la construction des savoirs visés. Pour Bautier et Rayou (2013), un malentendu est alors susceptible de se produire lorsque les enseignant·e·s pensent que ce processus s’enclenche spontanément, ce qui serait loin d’être le cas. De leur côté, certains apprenant·e·s estiment qu’il suffit de s’acquitter sérieusement de la tâche, parfois en se focalisant sur ses aspects les plus superficielles, pour atteindre les exigences sous-jacentes. Il y a donc un effet de leurre réciproque qui peut s’installer et échapper à la vigilance des deux parties qui n’en ont pas clairement conscience. La manifestation de ce malentendu n’apparait alors que plus tardivement, généralement lorsque sont donnés les résultats de l’évaluation finale.
Bautier et Rayou (2013, p. 55-58) fournissent une illustration de cette dynamique à travers l’exemple de l’enseignement de la dissertation philosophique en France.
Si la notion de malentendu a été mobilisée notamment pour penser la difficile transition entre les enseignements primaire et secondaire (voir par exemple, Bonnéry, 2007), nous pensons donc qu’elle peut également éclairer la transition entre les enseignements secondaire et universitaire.
2.2. Le concept de réflexivité
Nous nous appuyons sur les réflexions de Catherine Guillaumin (2009) pour expliciter l’idée de réflexivité. S’appuyant sur les travaux de Jean Piaget, l’abstraction réfléchissante peut être définie dans un premier temps comme la pensée portant sur les actions et opérations du sujet (Guillaumin, 2009, p. 89). La pensée réflexive (ou abstraction réfléchie) se veut une démarche allant un cran plus loin : il s’agit d’une pensée qui prend pour objet la pensée du sujet elle-même, une sorte de « réflexion sur la réflexion » (p. 89) qui permet une rétroaction sur les processus de pensée. Citant également Edgar Morin, Guillaumin (2009, p. 90) indique :
Il s’agit du retour de l’esprit sur lui-même via le langage (…) qui permet à la conscience de se réfléchir ce qui signifie se manifester à elle-même. C’est donc par ce possible retour qu’une pensée de la pensée peut rétroagir sur la pensée. Ce retour rend également possible corrélativement une pensée de soi capable de rétroagir sur soi. Encore plus précisément et de manière plus rigoureuse, la réflexion signifie dédoublement du réfléchissant en réfléchi et le point de vue réflexif constitue un méta point de vue par rapport au point de vue réfléchi.
Enfin s’appuyant sur Donald Schön, qui lie étroitement réflexion et action, la réflexivité peut être définie (Guillaumin, 2009, p. 93) comme
aptitude à reconsidérer, repenser, reconstruire mentalement ses expériences et ses actions d’une manière réfléchie et plus ou moins systématique. La réflexivité implique et présuppose à la fois une attitude d’ouverture, d’éveil et même de curiosité pour mettre en question l’évidence de ses propres situations et expériences.
La réflexivité peut être considérée comme une condition nécessaire à toute pratique scientifique, en particulier en sciences humaines et sociales (Blanchet, 2009). En ce sens (p. 148), elle doit interroger à la fois les démarches méthodologiques et épistémiques en jeu, et les résultats qui sont produits sur cette base (réflexivité comme moyen et comme objectif).
Enfin, comme nous l’avons déjà mentionné, le langage tient une place importante dans le déploiement de la pensée réflexive. Molinié (2009) insiste en particulier sur l’importance du développement d’une culture de l’écrit de ce point de vue. S’appuyant sur Michel de Montaigne, elle met en avant comment certaines pratiques d’écriture favorisent la construction par le sujet de la singularité de son point de vue. Ainsi, la subjectivité, loin d’être repoussée, se veut « une affirmation de soi en tant que sujet indépendant de toute autorité » (p. 106) qui va lui permettre de résister aux injonctions morales et normatives de la société. En ce sens, la posture réflexive est susceptible de favoriser la distanciation, voire la rupture, avec les diverses doxas et représentations de sens commun.
Aussi bénéfique qu’elle puisse potentiellement être, la pratique de la réflexivité par les étudiant·e·s se heurtent néanmoins à une série d’obstacles conséquents et fréquents (Le Boucher et al., 2018 ; Verslype et al., 2017 ; Michaud, 2012) : maitrise insuffisante des pratiques d’écriture qu’elle suppose, manque de familiarité avec la posture réflexive (qui ne fait généralement pas l’objet d’un enseignement explicite), démarche chronophage, exigence considérée comme excessivement formelle et insuffisamment concrète, etc.
3. Description du dispositif pédagogique
3.1. Inscription dans une réforme plus large
Le dispositif pédagogique que nous allons décrire s’inscrit dans une réforme d’ensemble (dénommée « NewBA ») des bacheliers au sein de la Faculté des sciences psychologiques et de l’éducation à l’Université libre de Bruxelles. Cette réforme vise à repenser l’organisation générale du cursus, tant au niveau des contenus que des pratiques d’enseignement, en promouvant des méthodes pédagogiques « actives » qui implique les étudiant·e·s dans la construction de leurs connaissances. Elle vise également à structurer les enseignements dans une logique davantage curriculaire qui assure une plus grande cohérence et continuité dans les apprentissages.
La pierre angulaire de cette réforme a été la création lors de l’année académique 2020-2021 d’une nouvelle unité d’enseignement (UE) en première année du bachelier, intitulée prosaïquement « Starting-Block ». Elle comptabilise 10 crédits ECTS (pour un total annuel de 60), ce qui en fait une des plus importantes en première année. L’UE consiste en une introduction aux approches plurielles en sciences psychologiques et de l’éducation et en logopédie (sciences PsyEL). Elle a pour but de favoriser une entrée progressive des étudiant·e·s dans une discipline qui est très peu enseignée dans l’enseignement secondaire ; elle doit également les aider à adopter une posture épistémique plus adéquate avec les spécificités des savoirs et exigences universitaires, notamment pour les disciplines concernées.
3.2. Description de l’UE « Starting-Block »
3.2.1. Les cours magistraux
Un premier volet de l’UE est consacré aux cours magistraux ; ceux-ci sont composés de divers enseignements portant sur les définitions, les méthodologies (qualitatives et quantitatives) et l’histoire générale relatives aux sciences PsyEL. Une cartographie des divers sous-domaines qui les composent est également proposée. Pour ces enseignements, l’ensemble des services et centres de recherche au sein de la faculté des sciences PsyEL est mis à contribution (cognition et neurosciences, psychologie clinique, psychologie sociale et interculturelle, psychologie des organisations et des institutions, psychologie du travail et de la consommation, sciences de l’éducation et logopédie). Par ailleurs, des intervenant·e·s extérieur·e·s issu·e·s de divers domaines professionnels sont également invité·e·s à s’exprimer devant les étudiants pour leur décrire les réalités professionnelles des débouchés. Ces interventions ont pour objectif tout à la fois de déconstruire certaines idées préconçues sur les pratiques en psychologie, et d’élargir l’horizon des étudiants quant aux possibilités professionnelles que leur offre le cursus.
3.2.2. Le travail de recherche en groupe
Le second volet de l’UE – sur lequel nous allons davantage nous appesantir – est consacré aux travaux pratiques (TP) qui se structurent principalement autour d’un travail de recherche à mener en groupe et la réalisation d’un portfolio. Le travail de recherche porte sur une thématique générale à choisir dans une liste préétablie. Il a la particularité de débuter par l’observation « naïve » d’une situation (observée in situ, ou ex situ à travers un enregistrement vidéo) ; elle est naïve au sens où elle s’opère avant toute consultation de la littérature. Par conséquent, elle n’est pas outillée d’un point de vue conceptuel, théorique et méthodologique. Cette observation fait l’objet d’une description écrite détaillée effectuée de manière individuelle, et d’une synthèse à établir par l’ensemble du groupe. Le but de cette étape est double :
1) Les tractations autour de la description collective encouragent les étudiant·e·s à prendre conscience que, même si la situation observée est commune à tout le groupe, les descriptions individuelles peuvent différer en fonction de la grille de lecture adoptée par chacun·e. Ce constat sera utile par la suite au moment où le groupe devra construire une problématique (voir plus loin) et faire le choix d’un cadre théorique ; retenir un cadre théorique parmi tous ceux disponibles implique en effet d’adopter, ici aussi, une grille de lecture spécifique par rapport au sujet travaillé.
2) En comparant cette démarche dite « naïve » avec la démarche plus rigoureuse et scientifique qui sera adoptée pour le reste du travail, les étudiant·e·s pourraient être amené·e·s à inférer et mieux comprendre les démarcations, voire les ruptures, qu’il est nécessaire d’adopter à l’encontre des préconceptions et prénotions afin d’étudier et analyser un phénomène donné.
Une fois l’observation naïve effectuée [1], chaque groupe est amené à élaborer une question de départ pour préciser et affiner le sujet de recherche. Ensuite, une exploration de la littérature scientifique afférente est menée sur cette base, appuyée d’une critique des sources transcrite dans une fiche de lecture. Il est exigé des groupes une certaine diversité bibliographique, tant dans les cadres théoriques que dans les méthodologies empiriques rencontrés. Cette pluralité doit amener à une confrontation des sources et, par la suite, un seul cadre théorique doit être retenu pour la construction de la problématique. Ce choix doit être justifié par le groupe en regard de la question de départ. Nous avons fait ici le choix de ne pas permettre aux étudiant·e·s de construire une problématique par combinaison de plusieurs cadres théoriques car, s’agissant d’un premier travail de cette nature, le processus nous semblait trop complexe à ce stade. Une fois un cadre théorique fixé, le travail de problématisation consiste pour le groupe à se ressaisir de la question de départ pour la reformuler et la développer avec les outils théoriques qu’il fournit. Par ailleurs, aucun travail empirique n’est exigé à ce stade étant donné que les étudiant·e·s ne sont pas encore suffisamment outillé·e·s pour le faire (la première UE qui y est spécifiquement consacrée se situe en deuxième année du bachelier). Néanmoins, dans le cadre d’un entretien individuel auprès d’un·e professionnel·le formé·e aux sciences PsyEL, le groupe doit le·la questionner sur leur problématique et discuter de manière critique les éléments de réponse apportés.
Deux productions sont attendues de la part des groupes : (1) une présentation orale synthétisant le travail effectué jusqu’à la problématique ; (2) sur base des retours fournis lors de cette présentation orale, un rapport écrit de l’ensemble du travail doit être rédigé.
3.2.3. Le portfolio
Le portfolio est conçu de manière individuelle et se compose d’une série d’éléments ayant trait aux expériences et apprentissages vécus par l’étudiant·e dans le cadre de l’UE Starting-Block. Ces éléments s’articulent autour d’une pièce maitresse : un texte d’analyse réflexive structurée autour de deux questionnements :
1) En quoi les approches épistémologiques et méthodologiques en sciences PsyEL impliquent-elles un regard spécifique – par rapport à une préconception « naïve » ou commune des choses et par rapport à d’autres disciplines scientifiques – sur les phénomènes qu’elles étudient ?
2) Quelles sont les spécificités des études universitaires en sciences PsyEL et des professions auxquelles elles mènent ?
Il est demandé aux étudiant·e·s de s’appuyer sur leurs vécus expérientiels dans le cadre de l’UE (et du cursus en général). En particulier, pour la première question, il·elle·s doivent s’appuyer sur une comparaison entre la démarche intellectuelle opérée pour décrire l’observation naïve et celle mobilisée pour élaborer leur travail de recherche, de la question de départ jusqu’à la problématique. Pour la seconde question, il leur est demandé de s’appuyer sur l’entretien individuel avec le·la professionnel·le déjà cité précédemment.
3.2.4. Accompagnement via un dispositif de tutorat par les pairs
Pour mener ces différents travaux, les étudiant·e·s ne bénéficient pas au préalable de cours magistraux spécifiquement pour les y préparer. Seules des séances d’informations sont organisées, notamment pour s’assurer de la bonne compréhension des consignes. Il s’agit ainsi de favoriser l’autonomie des étudiant·e·s en les poussant à se confronter par eux·elles-mêmes à la complexité ; tenter d’enseigner à priori une compétence aussi complexe que l’élaboration d’un travail de recherche nous semblait en effet peu porteur. Il est par ailleurs difficile d’anticiper toutes les difficultés qui peuvent être rencontrées.
Néanmoins, les étudiant·e·s ne sont pas livré·e·s à eux·elles-mêmes. Outre une série de ressources en ligne mises à leur disposition (notamment en ce qui concerne la recherche et l’exploitation bibliographique), chaque groupe bénéficie de l’accompagnement d’un·e tuteur·rice, qui est un·e étudiant·e plus avancé·e dans le cursus (en 3e année de bachelier ou en 1ère année de master). Ces tuteurs et tutrices ont spécifiquement été formé·e·s pour assurer ce suivi, et elle·il·s bénéficient également d’un encadrement par l’assistant chargé des TP et par le bureau d’accompagnement pédagogique de la Faculté. En plus de cet accompagnement de première ligne, les étudiant·e·s bénéficient d’un accompagnement de deuxième ligne, par l’assistant chargé des TP.
4. Étude critique du dispositif
4.1. Analyse critique et ébauche d’une problématique
Les travaux sur les malentendus en contexte scolaire (Bautier & Rayou, 2013 ; Rochex & Crinon, 2011 ; Bonnéry, 2007) mettent en évidence un écueil important : proposer aux apprenant·e·s des situations et des tâches qui les mettent en activité autonome, notamment à travers la mobilisation de leurs connaissances expérientielles, n’implique pas qu’il·elle·s soient en mesure de transformer cette expérience première en connaissances formelles décontextualisées et dépersonnalisées. Ce processus de « secondarisation » n’est pas spontané chez tou·te·s les apprenant·e·s et peut nécessiter un accompagnement spécifique.
Dans le cadre des TP de Starting-Block, suffit-il de demander aux étudiant·e·s de porter un regard réflexif sur leurs travaux et apprentissages pour qu’il·elle·s comprennent le sens de la démarche exigée et produisent le type de posture et de connaissances attendues (Baillet, Kahn & Rey, 2021) ? À plusieurs égards, celles-ci se révèlent par ailleurs fort éloignées de ce qui a été enseigné dans le secondaire. Pour nombre d’élèves l’exercice qui leur est demandé constitue une première qui peut générer angoisse et peur de l’inconnue.
Certes, nous avons décrit une série de mesures susceptibles d’aider les étudiant·e·s, mais elles présentent aussi des limites. Ainsi, la phase initiale d’observation naïve a été conçue de manière à favoriser la prise de consciences des ruptures à opérer en partant d’un vécu concret et spontanée des étudiant·e·s. Néanmoins, sont-elle·il·s toujours en mesure de secondariser cette expérience première pour en retirer une réflexion critique sur les spécificités épistémiques des sciences PsyEL ? N’y a-t-il pas un risque que cette tâche soit perçue uniquement comme une exigence purement formelle, ou comme une manière plus concrète/ludique d’entrer dans le vif du sujet ?
Quant aux tuteur·rice·s, ce sont avant tout des étudiant·e·s dont la formation n’est pas encore achevée. Les difficultés rencontrées en 1ère année peuvent ainsi perdurer à diverses étapes du parcours académique, et donc chez ces étudiant·e·s également, même si c’est à un degré moindre. Cela n’a au fond rien d’anormal. D’autant plus que, pour les trois premières années du dispositif du moins, la majorité d’entre eux·elles ne l’aura pas expérimenté de manière directe durant son propre parcours. Quant à la seconde ligne de l’accompagnement, elle doit assumer la prise en charge d’un nombre conséquent d’étudiant·e·s (près de 800 pour les TP). Le recours au tutorat et aux diverses ingénieries de formation, pour ingénieuses et créatives qu’elles soient, ne saurait masquer les difficultés liées au définancement chronique de l’enseignement supérieur en Belgique francophone depuis plusieurs décennies (Lambert, 2018). Dans ce contexte, les ressources proposées aux étudiant·e·s sont-elles adaptées et suffisantes ? En particulier, pour celles et ceux qui éprouvent les plus grandes difficultés à s’adapter aux exigences d’autonomie du travail universitaire et à opérer les ruptures épistémiques attendues, l’accompagnement proposée est-il suffisant ? Malgré les mesures mises en place, un hiatus générateur de malentendus est-il susceptible de s’installer entre les exigences des TP et la nature réelle du travail effectué par les étudiant·e·s ?
4.2. Canvas empirique
Pour tenter d’apporter des éléments de réponse à ces questions, deux instruments de recueil de données sont mis en œuvre.
Tout d’abord, une série d’entretiens individuels de type semi-directif sont menés auprès d’une cinquantaine d’étudiant·e·s ayant participé aux TP. Ces entretiens visent à mieux cerner comment s’est déroulée concrètement la réalisation des travaux, à mettre en exergue les difficultés rencontrées et à identifier si les mesures d’accompagnement sont suffisantes et pertinentes. En particulier, les étudiant·e·s sont interrogé·e·s sur leur interprétation des diverses consignes et leur perception de la finalité des tâches et des exigences formulées (notamment en ce qui concerne l’observation naïve et le texte d’analyse réflexive). Il leur est également demander de décrire en détails le déroulement et la nature de la relation pédagogique avec leur tuteur·rice et le soutien concret qui a été procuré.
Dans un 2nd temps, et une fois l’année académique achevée, un questionnaire en ligne sera diffusé à l’échelle de toute la cohorte. S’appuyant sur l’analyse des données recueillies lors des entretiens, il vise à recueillir les perceptions générales des étudiants sur la nature et la pertinence du dispositif pédagogique de l’UE. Certes, cet instrument ne permettra pas de récolter des données aussi précises et détaillées que lors des entretiens individuels, mais il fournira une image plus représentative de leur vécu et de leurs représentations.
5. Conclusions
La réforme NewBA impulsée par la Faculté des sciences PsyEL de l’ULB marque la volonté de proposer aux étudiant·e·s des curricula plus cohérents et des dispositifs d’enseignement plus pertinents et stimulants. Une participation plus active des étudiant·e·s à l’élaboration de leurs connaissances, une plus grande intensité des interactions (notamment entre pairs) ainsi que la stimulation de la réflexivité font partie des moyens mis en œuvre dans le cadre des TP de Starting-Block. Ces moyens concourent à provoquer chez les étudiant·e·s des apprentissages plus signifiants et profonds et, au final, une plus grande autonomie intellectuelle. Les meilleures intentions ne suffisent pas cependant pour parvenir aux résultats escomptés, en particulier s’agissant d’en faire bénéficier un maximum d’étudiant·e·s, quel que soit leur parcours social et académique. Les risques de malentendus sont prégnants, et il n’aurait pas été raisonnable de faire l’économie d’une évaluation approfondie des effets concrets du dispositif pédagogique. En identifiant les divers processus en jeu, il sera alors possible d’apporter des améliorations allant dans le sens des finalités souhaitées.
6. Références bibliographiques
Baillet, D., Kahn, S. & Rey, B. (2021). Les savoirs enseignés à l’université : une piste pour saisir les difficultés d’apprentissage rencontrées par les étudiants de première année ? Revue française de pédagogie, 210, 5-18.
Bautier, É. & Rayou, P. (2013). Les inégalités d’apprentissage. Programmes, pratiques et malentendus scolaires (2e édition). Paris : Presses Universitaires de France.
Blanchet, P. (2009). La réflexivité comme condition et comme objectif d’une recherche scientifique humaine et sociale. Cahiers de sociolinguistique, 14, 145-152.
Bonnéry, S. (2007). Comprendre l’échec scolaire. Élèves en difficultés et dispositifs pédagogiques. Paris : La Dispute.
Guillaumin, C. (2009). La réflexivité comme compétence : enjeu des nouvelles ingénieries de la formation. Cahiers de sociolinguistique, 14, 85-101.
Lambert, J.-P. (2018). Il faut rééquilibrer les priorités en FWB. La Revue nouvelle, 73(8), 80-87.
Le Boucher, C., Lameul, G. & Pentecouteau, H. (2018). L’expérimentation du eportfolio à l’université : questionnements autour de la réflexivité. The Canadian Journal for the Scholarship of Teaching and Learning, 9 (3).
Michaud, C. (2012). Le portfolio, quel lien entre les écrits réflexifs et les compétences ? Mesure et évaluation en éducation, 35(2), 9-38.
Molinié, M. (2009). Réflexivité et culture de l’écrit. Éléments pour une conception réflexive de la littératie. Cahiers de sociolinguistique, 14, 103-128.
Rochex, J.-Y. & Crinon, J. (Éd). (2011). La construction des inégalités scolaires. Au cœur des pratiques et des dispositifs d’enseignement. Rennes : Presses universitaires de Rennes.
Van Campenhoudt, L. & Quivy, R. (2011). Manuel de recherche en sciences sociales (4e édition). Paris : Dunod.
Verslype, L., Lecoq, J., Corten-Gualtieri, P. & Druart, E. (2017). Évaluation d’un dispositif d’ePortfolio universitaire en archéologie et histoire de l’art. Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, 33(1).
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