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Ressources Educatives Libres : Comment garantir les deux “R” qui fâchent… (réviser, remixer)

4 novembre 2024 par Colin de la Higuera Coopérer 83 visites 0 commentaire

Un article repris de https://chaireunescorelia.univ-nant...

Les ressources éducatives libres sont construites autour des cinq “R”, tels que définis par David Wiley en 2014 : Retenir, Réutiliser, Réviser, Remixer, Redistribuer.

Les deux “R” les plus complexes sont aussi ceux qui séparent les REL de l’open access. Le 3ème “R”, “Réviser”, permet à quelqu’un d’adapter une ressource. Le 4ème, “Remixer”, permet à cette personne de prendre deux REL (ou plus) et de les mélanger pour en faire une seule.

Ces “R” sont essentiels, car ils vont permettre à l’enseignant·e d’adapter un matériel pédagogique à ses besoins ou à ceux de ses élèves. Il va aussi permettre de traduire et de localiser. En discutant avec nos collègues de pays lointains, on se rend compte que c’est un enjeu majeur : ces collègues sont ravi·es d’avoir accès à des ressources gratuites, bien entendu, mais parlent de néocolonialisme qui se met en place quand la seule option est d’utiliser livres et manuels tels quels.

Modifier, mais comment ?

La question qui divise la communauté est “Que signifie offrir la possibilité de modifier ?”.

Pour bien comprendre, appelons Anne la productrice initiale de la REL et Bob la personne qui veut prendre la ressource d’Anne et la réviser.

Il y a deux réponses possibles à notre question : la première est purement légale. En faisant de sa ressource une REL, Anne offre à qui le veut la possibilité légale de modifier et de redistribuer, en accord avec la licence spécifique qu’Anne a choisie. Jusque-là, tout le monde est d’accord.

Mais pour que ce droit puisse s’exercer, encore faut-il que Bob puisse récupérer la ressource et l’éditer depuis son ordinateur (on supposera qu’il s’agit d’une ressource numérique) afin d’effectuer des changements. Et c’est là que ça se corse.

Les enjeux techniques de la question

Les auteur·es de REL ont un large choix d’outils qu’ils/elles peuvent utiliser pour développer leurs cours. Cela va des logiciels de traitement de texte commerciaux (le plus connu étant Microsoft Word) à ceux ouverts (LibreOffice Writer), ou spécialisés (LateX). Ils/Elles peuvent aussi poster leurs cours directement sur Internet et préféreront alors utiliser une plateforme dédiée : Moodle, WordPress ou Pressbooks.

Certain·es écrivent déjà en utilisant des langages plus faciles à transférer comme Markup (ou Markdown).

Notons que ces choix dépendent de nombreux facteurs : ce que l’auteur·e maîtrise, de l’environnement auquel il/elle a accès, de la politique éditoriale et de distribution à laquelle il/elle adhère dès le moment de la conception.

L’auteur·e peut aussi avoir besoin de s’appuyer sur du matériel existant pour construire son cours et là aussi, des contraintes techniques peuvent motiver son choix.

Notons également qu’écrire un cours est une activité très complexe et qu’il est indispensable que lors de la phase de rédaction, l’auteur·e puisse travailler confortablement en tirant tout le parti des outils d’édition qu’il/elle aura choisis.

Son envie ou son besoin de collaborer dans l’écriture peut également avoir une importance sur ce choix qui se portera alors souvent sur une solution connue des différentes parties.

Les formats de distribution

Anne peut choisir le format dans lequel elle conçoit son cours. Elle peut peut-être choisir celui dans lequel elle le distribue. Malheureusement, les deux choix ne sont pas indépendants et le premier choix peut fortement déterminer l’autre !

Or, vu depuis le point de vue de Bob, de nombreux choix couramment effectués ne lui permettent hélas pas de réviser directement. Ou l’obligent à payer une licence spéciale pour pouvoir le faire. C’est le cas des fichiers PDF en particulier. Mais c’est aussi le cas de cet article de blog, par exemple !

Parfois, des manipulations permettent quand même de récupérer le texte et de l’importer dans son outil d’édition.

Des choix de formats propriétaires, voire fermés, peuvent donc avoir une incidence réelle sur la capacité à réviser.

Vers une vision plus sociale des licences ouvertes

Les licences Creative Commons ont été inventées pour protéger à la fois Anne et Bob, ainsi que les plateformes dont ils ont besoin pour échanger. Ce sont donc des objets juridiques avec des règles qui permettent à ces licences de résister dans le temps (à ma connaissance, Creative Commons n’a pas perdu un procès en 20 ans d’existence !).

Mais pour que Anne et Bob s’y retrouvent, il nous faut plus que de simples arguments juridiques.

L’édition ouverte

Une manière de résoudre le problème est de proposer à Anne des outils d’édition qui vont lui permettre de concevoir sa ressource de façon commode, et qui vont aussi lui permettre d’exporter le résultat de façon agréable et utile pour Bob.

La distribution ouverte

Un bon outil de distribution doit permettre à Anne d’exporter son cours dans une variété de formats : certains privilégieront une lecture écran, d’autres une lecture papier, d’autres enfin la réinstallation sur l’outil d’édition de Bob.

Le consensus social

Enfin, peut-être faut-il voir la licence qu’Anne a apposée sur sa ressource comme allant plus loin qu’un simple geste juridique. Il signifie : “je partage”. Et à partir de là, il légitime le fait que Bob contacte Anne et lui demande si elle n’a pas la ressource dans un autre format, qui faciliterait cet échange.

Conclusion

Dans cette analyse, nous avons surtout examiné la question des ressources textuelles. Il faudrait sans doute réexaminer point par point et format par format avant de pouvoir généraliser.

Nous sommes toutes et tous à la fois Anne et Bob. Ne perdons pas cela de vue. Nous devons aussi construire, choisir, échanger sur les bons modèles d’édition et de distribution. Et utiliser les licences ouvertes pour ouvrir les discussions.

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