Un articlerepris du blog Pédago 21 de Marius Bourgeois, un site sous licnce CC by nc sa
Salutations à mes collègues de l’Association des écoles privées de l’Estrie. Ce billet est spécialement pour vous, tel que promis. Bon succès dans vos prochaines étapes !
Des barrières et des recettes
À première vue, les barrières à l’innovation dans nos écoles paraissent immuables parfois. Le temps, les exigences du système, les évaluations, le leadership, le travail d’équipe, l’infrastructure. Or l’école repensée, elle se vit au quotidien dans plusieurs écoles, dans plusieurs salles de classe. Comment cela se peut-il ? Comment arriver à personnaliser l’éducation, développer les compétences de nos élèves tout en répondant aux exigences du système ? J’apprécie les questions qui commencent par « comment ». Ça sous-entend que c’est possible, qu’on cherche une façon d’y arriver, de faire autrement. Pour faire autrement, il faut voir les choses autrement. Un des grands défis en éducation, c’est que nous sommes tous issus d’un système qui valorisait la bonne réponse. Nous avons réussi dans ce système et nous sommes habitués d’avoir la bonne réponse. C’est donc très normal de demander « comment faire xyz », de demander la recette de quelqu’un d’autre. On veut réussir du premier coup. Or l’école repensée, elle est à l’intérieur de chacun et chacune d’entre nous. Il n’y a pas UNE recette, il y a des recettes. La meilleure ? La vôtre, celle que vous allez créer, peaufiner, expérimenter avec les apprenants qui sont devant vous. Quand suffisamment de gens auront trouvé des façons d’innover à l’intérieur de la boîte, le système pourra redéfinir les paramètres de la boîte. L’école repensée ne viendra pas de la boîte à mon avis. Elle viendra de nous. C’est tellement stimulant. Pensez-y.
Or l’école repensée, elle est à l’intérieur de chacun et chacune d’entre nous. @bourmu
Des questions qui commencent par « Comment »
Suite à ma conférence de vendredi, j’avais le privilège d’animer une session de réflexion portant sur le leadership pédagogique. La session de réflexion a débuté… avec une réflexion. Quelles idées avez-vous en tête ? Comment vos élèves en profiteront-ils ? Quelle question aimeriez-vous qu’on aborde ensemble pendant l’après-conférence ? Nos questions sont comme un trousseau de clés. Plus nos questions sont intéressantes, plus elles ouvrent des portes intéressantes. Voici 30 questions, très intéressantes « comment », proposées par les participantes et participants :
– 1 Comment penser autrement la structure ?
– 2 On fait comment pour aider 33 élèves à pédaler en même temps ?
– 3 Comment bien exploiter les technologies sans appareils électroniques fournis par l’école pour tous les élèves ?
– 4 Comment arrimer cette belle théorie avec la réalité des contraintes des écoles ?
– 5 Comment mettre à profit les élèves avec qui nous avons déjà une excellente relation pour aider à améliorer nos relations avec les autre élèves pour qui c’est moins évident ?
– 6 Comment intégrer le 20% dans la boîte d un programme d’un cours ?
– 7 Comment valider ces choix pédagogiques (absence de notes avant les bulletins) auprès des parents (qui sont tellement axés sur les résultats) ?
– 8 Comment changer les évaluations en gardant les bulletins aux dates fixes ?
– 9 Comment peut-on laisser les enfants apprendre à leur rythme tout en répondant aux critères du Ministère ?
– 10 Comment articuler concrètement le leadership en classe auprès de nos élèves ? Des outils réels et concrets dans les matières différentes svp…
– 11 Comment équilibrer leadership et autorité ?
– 12 Comment faire pour qu’il y est une balance dans la vie des élèves versus les appareils technologiques … un réseau social plus qu’un outil technologique ?
– 13 Comment exercer un bon leadership quand je vis une situation de crise avec un élève ?
– 14 Comment équilibrer leadership et autorité ?
– 15 Comment peut-on réalistement implanter ce type de pédagogie en ayant un cadre administratif si contraignant ? Les étapes très courtes, les notes obligatoires dans les différentes compétences, etc.
– 16 Comment pouvons-nous créer des projets significatifs en ayant des notes à récolter afin d’être conformes aux exigences du ministère ?
– 17 Mon questionnement toujours arrimer les exigences du programme et les projets et les passions des élèves…
– 18 Comment intégrer le leadership dans un cadre peu flexible sur lequel nous avons aucun contrôle (liberté) ?
- 19 Comment trouver un équilibre entre la progression des apprentissages imposée et l’intégration des nouvelles méthodes d’enseignement.
– 20 Comment trouver un équilibre entre la progression des apprentissages imposée et l’intégration des nouvelles méthodes d’enseignement.
– 21 Comment faire des évaluations « non fixes » mais équitables ?
– 22 Comment créer (aussi) cet esprit de leadership en département ?
– 23 Quelles activités puis-je faire avec mes élèves pour améliorer leur leadership ?
– 24 Comment peut-on réussir concrètement à bâtir une relation solide et propulser CHACUN des élèves dans leur potentiel en les voyant seulement une heure par jour ou moins ?
– 25 Comment faire, concrètement, pour maintenir cette vision plus souple dans une structure globale rigide qui impose un programme, des communications de résultats constantes et des épreuves uniformes ? Quoi prioriser ?
– 26 Comment faire en sorte que les élèves apprennent à leur rythme tout en respectant le contenu du programme sans tomber dans l’enseignement individuel.
– 27 Comment initier un changement auprès des collègues ?
– 28 Évaluation au moment où l’élève est prêt… est-ce réaliste ?
– 29 Considérant qu’il est important d’avoir plusieurs manifestations des élèves de leurs compétences mobilisées en évaluation, comment faire pour optimiser les évaluations pour permettre aux élèves de démontrer leurs compétences, sans les surcharger ou les stresser ?
- 30 Comment peut-on faire des évaluations aux moments où l’élève est prêt tout en faisant des évaluations équitables ?
4 concepts-clés
Je ne peux pas faire le tour de chacune des questions. Mais derrière le concept du leadership pédagogique se trouve l’idée que nous sommes tous appelés à devenir des concepteurs d’expériences d’apprentissage. Devenir. Il n’y a pas de ligne d’arrivée ici. Qui dit https://www.innovation-pedagogique.fr/ecrire/?exec=article_edit&id_article=2841#concepteur, dit essai-erreur. On est loin des recettes ici. Tout part de soi. En acceptant l’invitation de devenir un leader pédagogique, on accepte aussi l’idée que nous sommes les seuls responsables de ce qui est possible ou non dans notre salle de classe (la boîte). Le pouvoir d’action est là. Les excuses doivent rester à la porte ici je crois. Et je crois également au message de George Bernard Shaw.
Je vous propose donc quatre concepts-clés qui peuvent soutenir les expériences d’apprentissage que vous allez créer avec et pour vos élèves.
QUELLES SONT LES 10 PIRES IDÉES AUXQUELLES VOUS POUVEZ PENSER ?
Une bonne façon d’aborder la conception d’expériences d’apprentissage, c’est d’anticiper que tout ne sera pas parfait du premier coup. On peut même partir de l’imperfection pour en arriver à des idées qui ont de la valeur. Quelles sont les 10 pires idées auxquelles vous pouvez penser pour répondre à la question qui vous habite au moment d’essayer de faire autrement dans votre classe ou votre école ? Je suis certain que si vous essayez de trouver 10 mauvaises idées pour chacune des 30 questions énumérées plus haut, vous tomberez sur d’excellentes idées éventuellement. L’avantage ici, c’est que ce processus vous libère l’esprit de la nécessité de trouver la bonne idée avant de commencer. Idéalement, je vous suggère de vivre ce processus en équipe. Et comme le dit si bien Sir Ken Robinson : « If you are not prepared to be wrong, you’ll never come up with anything original. » La partie facile, c’est de générer des idées. Ensuite, il faut aller les tester. Un bloc de 20 minutes, une leçon, une semaine, un projet, une unité, un cours, un programme. À vous de choisir. Ce sera un processus d’essai-erreur.
Quelles sont les 10 pires idées auxquelles vous pouvez penser pour répondre à la question qui vous habite au moment d’essayer de faire autrement dans votre classe ou votre école ? @bourmu
DES ESPACES D’APPRENTISSAGE FLEXIBLES
Il est beaucoup question des espaces d’apprentissage depuis un certain temps. Je n’irai pas dans le détail ici mais je posais la question suivante aux membres du panel de discussion dans le cadre de TELL2017 en août dernier. La transformation des espaces physiques et numériques mène-t-elle nécessairement à la transformation de la pédagogie ? Au-delà des salles de classe à la Pinterest, je crois que l’espace d’apprentissage le plus important, c’est le cerveau du concepteur et celui de l’apprenant. La flexibilité commence là à mon avis. L’espace physique et les espaces numériques doivent être alignés avec les intentions pédagogiques (connaissances, compétences globales) et créer les conditions dans lesquelles nous apprenons tous aujourd’hui. Tout espace peut devenir un espace d’apprentissage innovant et stimulant. Pensez-y
METTRE LES FORCES ET INTÉRÊTS DES ÉLÈVES AU SERVICE DE L’APPRENTISSAGE
L’école repensée ne se fait pas seul depuis le devant de la classe. C’est un peu comme recevoir la famille dans le temps des Fêtes et vouloir tout faire et préparer le repas soi-même. Combien plus efficace (et moins stressant !) est-ce quand tout le monde se mobilise. Un prépare la tourtière, l’autre une salade, un autre prépare les patates pilées, un autre, la dinde… Notre repas. Pour que la classe devienne notre classe, il faut impliquer les élèves, apprendre à les connaître, les amener à se connaître, les amener à développer leur capacité à apprendre de façon autonome, stimuler leur curiosité naturelle, les mettre au défi… À quoi ressemble un cours qui permet ça ? On commence comment ? Il faut vouloir les amener plus loin que la fin du cours, comme le disait si bien Stéphane Laporte dans « Si les profs pouvaient ». Il faut lâcher prise, cesser de vouloir tout contrôler. Pour que l’école change, il faut qu’on change comment on fait l’école. Nos façons de faire présentement ont des limites parce que les adultes travaillent trop souvent plus fort que les élèves. Et ce n’est pas une question d’engagement. C’est ce qu’on leur demande. Les élèves peuvent tellement nous en donner plus. Plus d’eux-mêmes, plus d’originalité, plus de questions… pas plus d’obéissance cependant. Faisons-leur de la place pour voir…
PERSONNALISER ET DIFFÉRENCIER
À l’impossible nul n’est tenu. Les exigences du système sont bien réelles. Mais il y a une marge de manoeuvre. Je le vois chaque fois que je suis dans une école. Je réfléchis beaucoup à ce que peut signifier la différenciation et la personnalisation. Est-ce que ça veut dire la même chose ? Est-ce qu’il y a des nuances ? Voici comment je distingue les deux (ébauche).
Différenciation : on parle de différenciation lorsque le point de départ est le programme et qu’on ajuste le contenu, le produit ou le processus en fonction de l’apprenant qui est devant nous.
Personnalisation : On parle de personnalisation lorsque le point de départ est une force, une passion, un intérêt de l’apprenant (p. ex., projet 20%, robotique, fabrique…) et qu’on trouve où est le programme dans ce que l’apprenant réalise.
Quelle que soit l’idée qui vous allume et que vous souhaitez mettre en oeuvre dans votre classe ou votre école, donnez-vous la permission de ne pas réussir du premier coup.
La seule personne que vous pouvez changer, c’est vous. Si vous voulez voir vos collègues changer, modelez ce changement. C’est tout ce que vous pouvez faire.
Restez dans votre zone d’influence mais sortez de votre zone de confort.
L’école repensée, elle est en vous.
On se met à énumérer des mauvaises idées pour voir ?
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